Sautillante.
Peut-être parce qu'hier soir j'avais la France triste, je me suis mis à penser en musique. En musique et en vin. J'avais envie de boire frais (et je ne parle pas que de température). De me souvenir d'un pays finalement assez insouciant, cette France de la fin des années soixante-dix, vaguement secouée un peu plus tôt par un soi-disant "choc pétrolier", mais tellement à son aise, découvrant le turbo, bourgeoise aux cheveux longs, aux cols pelle-à-tarte et aux pattes d'éléphant.
Nous sommes en 1979, j'ai quinze ans. Le vin, lui, est de 2013, il a deux ans. Il est aussi blanc que la chemise de Denis Quilliard dit Jacno* est noire. Noire à col relevé à la façon punkabilly, comme Mick Jones, Joe Strummer ou Brian Setzer. Noire, certes, mais rien à voir avec cette nouvelle façon, très "jeunes gens modernes", un peu Kraftwerk, non plutôt Marquis de Sade, tendance Conrad Veidt, qui m'a troublé il y a quelque temps sur la photo d'une conférence de Presse de Marion Maréchal-Le Pen. Jacno est filmé par Olivier Assayas dont c'est l'une des premières réalisations. On le voit pianoter au balcon d'aluminium d'une des tours Perspective du quartier Beaugrenelle, en front de Seine. So 70's! Rectangle, vous vous souvenez? Si vous êtes un peu vieux comme moi, sûrement. Au sortir des Stinky Toys, ça nous a fait un choc.
Le vin est vif. Mûr mais vif, acidulé. Sautillant. On dirait les notes qui sortent de ce synthétiseur au look désormais un peu vieillot.
Oui, voilà, c'est le mot, sautillant. Sautillant comme cette France de 1979 qui avait besoin de longuement se creuser la tête pour s'inventer des problèmes.
Je me demande si parfois je ne préfère pas le sylvaner au riesling. Celui-ci vient d'un merveilleux petit village de carte postale, Niedermorschwir, dans cette Alsace où les drapeaux tricolores auront toujours pour moi le trait de Hansi, le parfum de la liberté que l'on ne devrait jamais avoir à retrouver. Le vigneron nous en a porté une caisse de ce sylvaner alors que nous dînions au caveau Morakopf. Je crois que déjà, ce jour-là, nous l'avions trouvé sautillant. Exactement comme, après tant d'années de paresse, de déni, de fuite, alors que tant de rancœurs, de haines recuites se sont installées, j'aimerais revoir ma France. Lavée de sa noirceur, de l'étrange noirceur de ses chemises. Ambitieuse. Sautillante.
"Rêvons" me disait hier soir une amie très chère. Oui, rêvons. Mais pas trop, car il faudrait vite se réveiller.
Oui, voilà, c'est le mot, sautillant. Sautillant comme cette France de 1979 qui avait besoin de longuement se creuser la tête pour s'inventer des problèmes.
Je me demande si parfois je ne préfère pas le sylvaner au riesling. Celui-ci vient d'un merveilleux petit village de carte postale, Niedermorschwir, dans cette Alsace où les drapeaux tricolores auront toujours pour moi le trait de Hansi, le parfum de la liberté que l'on ne devrait jamais avoir à retrouver. Le vigneron nous en a porté une caisse de ce sylvaner alors que nous dînions au caveau Morakopf. Je crois que déjà, ce jour-là, nous l'avions trouvé sautillant. Exactement comme, après tant d'années de paresse, de déni, de fuite, alors que tant de rancœurs, de haines recuites se sont installées, j'aimerais revoir ma France. Lavée de sa noirceur, de l'étrange noirceur de ses chemises. Ambitieuse. Sautillante.
"Rêvons" me disait hier soir une amie très chère. Oui, rêvons. Mais pas trop, car il faudrait vite se réveiller.
* Si vous ne connaissez pas ce musicien qui, après avoir essuyé les plâtres du mouvement punk, inventa la pop française des années 80, écoutez ça. Indispensable.
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