Petite lettre ouverte à je ne sais pas qui...


Cette Petite lettre ouverte à je ne sais pas qui... que vous allez lire ici, je n'en suis pas l'auteur. Elle reflète une colère parmi tant d'autres, la colère d'un vigneron parmi tant d'autres. Pas une colère violente comme celle de Jérôme Bosch qui renverse les tables, une colère froide. Et tant pis si c'est la colère d'un "riche" comme diront, dédaigneux, certains révolutionnaires d'opérette nourris à l'allocation.
Cette Petite lettre ouverte à je ne sais pas qui…, je la publie aussi parce que vendredi, j'ai du moi-même appeler en catastrophe la Mutualité Sociale Agricole pour un ami qui au sortir des vendanges, après avoir ouvert sa boîte à lettres, voulait aller chercher son fusil, peut-être même pas pour aller les trouver, mais pour le retourner contre lui. Ce même ami qui subit les brimades de l'Administration pour s'acharner stupidement à vouloir embaucher chaque année des êtres humains pour sa cueillette.
Cette Petite lettre ouverte à je ne sais pas qui..., je la publie enfin parce qu'elle m'a touché. Parce que ce vigneron, Jérôme Legras, m'a appelé à l'aide. Parce que ce qu'il dit, je l'entends partout. Et que ce genre de colères, il faudra bien un jour que la-France-d'en-haut (quel que soit son bord) les entende. Avant qu'il ne soit trop tard. Avant que le ciel ne s'obscurcisse.


Amis fâcheux sans visages,

Il y a un je ne sais quoi de démotivant aujourd'hui, comme une envie de rester coucher au lieu de bosser en silence pour nourrir des gens qui vous détestent au point de souhaiter vous voir disparaitre, en fait je crois que les histoires de censures et de taxes absurdes qui arpententI nternet en ce moment me turlupinent plus encore que je ne l'avais cru au départ.

D'abord car on avait clairement d'autres chats à fouetter pendant les vendanges que de répondre à vos provocations et aussi un peu parce que je n'aime pas trop me faire cracher dessus par des mecs que mon travail nourris à l’œil. Certains gueuleront et diront que je n'ai pas trop le droit de me plaindre. Ils n'auraient pas tord, un champenois qui se plaint ça flirt souvent entre le légèrement grotesque et franchement dégueulasse. Je devrais la fermer, d'autres ont moins de bol et après tout c'est à eux de l'ouvrir en premier. Mais là j'ai plus du tout envie de me taire.

Allez, passe encore votre boule puante dans le rapport de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, passe encore les augmentations de charges qui punissent les vignerons qui veulent de payer décemment leurs employés, passe encore les attaques idiotes de faux-écolos incapables de reconnaître que la profession dans son ensemble fait des efforts énormes et va dans le bon sens (le sens de l'arrêt progressif des herbicides, de la réduction des intrants, du bilan carbone, du bilan eau, etc...).

Rassurez vous. On y arrive très bien malgré vous, vos coups tordus et vos silences coupables.

Vos petites magouilles sont finalement assez supportables ce qui l'est moins c'est les propos de l'un d'entre vous, un certain M. Elineau dont j'ai pu découvrir la pensée dernièrement. J'avais déjà plus ou moins compris que nous n'étions plus les bienvenus, mais au point de lire qu'on devrait simplement nous censurer, qu'après tout c'est très possible puisqu'on le fait bien pour les pédophiles et les néonazis, il y a quand même plus d'un pas. Je sais pas si M. Elineau a chaussé les bottes de sept lieux de la bêtise pour sauter si vite d'empoisonneurs à néonazis mais en tout cas il a prouvé sa classe et son tact avec élégance. Après ce parallèle exquis on ne sait plus vraiment à quoi s'attendre... En tout cas soyez assurez messieurs de mon plus profond respect, celui que je réserve habituellement à ceux qui arrivent en retard au théâtre ou qui, avant un cambriolage, empoisonnent les yorkshire.

Messieurs nous n'avons pas besoin de vous.

C'est un brin cliché mais nous aimons notre métier et, grâce à Dieu, il nous le rend bien. L'amour et le soutiens on le trouve dans le sourire de nos clients, dans les messages inquiets de nos amis les jours de grêle et les matins de gelées, dans la conviction qu'il existe une voie un peu plus éclairée et une infinité de possibles, possibles culturaux, œnologiques, gustatifs. Donc finalement on arrive encore à se lever le matin.

En revanche faites gaffe, faites gaffe parce que votre grande connarditude, dont se fichent les gens qui ont, comme moi, le bol d'avoir les pieds dans des coins qui marchent encore pas mal, va finir par désespérer ceux qui souffrent déjà. Puisqu'il semble que ce soit votre souhait et puisque vous avez poussé le cynisme de vos actions ratées jusqu'à faire marche arrière à chaque fois, comme on plante des banderilles avant l'estocade, vous méritez la leçon qui vous sera donnée. Puisque vous avez poussé le mépris de toute une profession jusqu'à prétendre que vous avez été victime d'une erreur de "copier/coller" vous ne méritez plus grand chose à par notre indifférence.

Alors n'oubliez pas que bientôt vos carrières seront terminées, vos noms seront oubliés, et quand pour vous les ors de la républiques ne seront plus qu'un souvenir nous seront encore dans nos vignes, dans nos chais, sur les marchés du monde entier et nous porterons collectivement bien plus haut les valeurs d'excellence de notre pays que vous ne l'avez jamais fait. Vos idées ne sont heureusement que de passage, pas notre métier. Ce jour la, quand vous n'aurez plus que votre solitude pour vous, j'espère que les noms des domaines souvent familiaux et portés à bout de bras que vous aurez quand même réussi à exécuter, par ignorance et vanité, reviendront à votre mémoire et vous feront crever de chagrin.

Bien à vous.

Jérôme Legras.
Vigneron à Chouilly (Marne).



Commentaires

  1. Je ne bois pas de vin. Enfin si peu que ma consommation n’influencerais même pas la statistique de mon immeuble. Je ne bois pas parce qu’une maudite religion me le recommande, ni aucun principe : c’est arrivé comme ça, par amour du thé, de l’eau. Je me tape pourtant volontiers un très beau verre recommandé par un talentueux sommelier ou tout du moins quelqu’un de capable, qui sait discerner avec flair, exactitude ce qui pourrait accompagner à merveille un plat ou l’autre. Je déguste et j’apprécie dans la modestie de la palette des gouts qui me sont accordé par mon ignorance. Ç a ne fait pas de moi un ascète ou un peine-à-jouir, je n’ai rien a reprocher à personne, ni au cultivateur qui produit ça avec amour, ni à celui qui me le vend, ni à celui qui en parle. J’ai beaucoup de peine à comprendre ce qui peut pousser une catégorie d’embrocheurs administratifs, d’experts en abstinence, à vouloir faire disparaitre le vin. J’ai aussi l’impression que de ton coté du marécage, c’est devenu un sport national d’embrocher, une presque habitude de vouloir rendre efficient, plat, catalogué, moindre et lisse tout ce qui existe. J’ai bien aimé lire cette lettre, elle reflète un peu ce que l’on perçoit de ce coté, avec la distance comparative.

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