La parabole de l'Austin Allegro.
Franchement, je crois que je vais me mettre à relire le Wine Advocate. Ne voyez rien de méchant là-dedans, ce n'est pas directement lié au départ en pré-retraite de Robert Parker, et rassurez-vous, je crois toujours aussi peu au bien-fondé de ce système un peu vulgaire de la notation sur cent, sur vingt ou sur ce que vous voulez. Mais la revue pinardière américaine nouvelle version me détend.
Tenez, rien que pour cette phrase, aujourd'hui, qui me ravit (tout en revenant aux fondamentaux de la vinification). Le critique Neal Martin délivre son verdict sur les bordeaux 2014 et, dans un propos teinté d'une bonne dose d'humour britannique, évoque tous ces vins qui sont "agréables à boire" mais qui manquent de "densité et de matière". Tenter de "les forcer à devenir quelque chose de plus" au chai reviendrait, ajoute-t-il, à déguiser une Austin Allegro en voiture de course. L'Austin Allegro, comment dire? C'est un peu comme la R14 ou la R12 pour les Français; de nos jours, on dirait peut-être Dacia. Elle est en tout cas considérée outre-Manche comme une icône de la laideur et de l'échec automobile.
Je sais, c'est un peu con, mais sachant comme on a parfois tendance, en Gironde et ailleurs, à prendre le vin (et à se prendre) un peu trop au sérieux, cette image m'a fait rire dix bonnes minutes.
Plus sérieusement, et tout en se défendant avec une pirouette façon Harry Potter de tout "Bordeaux bashing", Neal Martin lance une sévère mise en garde aux propriétaires, leur demandant en substance de surveiller leurs prix, et d'arrêter de mélanger qualité des vins et profit immédiat. C'est à cette condition que les "primeurs" sont récupérables prévient-il. Avant de conclure que certains ne comprendront le message que quand les caisses commenceront à prendre la poussière dans leurs entrepôt et non dans ceux des autres.
Pour ceux que ça intéresse, ses meilleurs notes vont en vrac à Yquem, Suduiraut, Doisy-Daëne, Climens pour les sauternes et barsac, Cheval-Blanc, Figeac et Ausone pour les saint-émilions, Montrose, Cos d'Estournel, Grand-Puy-Lacoste et Latour en Médoc, La Mission Haut-Brion en Graves et Vieux Château Certan ainsi que La Violette à Pomerol.
Le Wine Advocate m'a également bien fait plaisir en lavant l'honneur du Roussillon insulté il y a peu par les commentaires désobligeants de Decanter (c'était ici et là). De nombreux crus (il en manque malheureusement) obtiennent de très grosses notes, flirtant avec les 100/100 et du cou, les vins des Pyrénées-Orientales, dans leur ensemble, ne sont plus traités comme des malpropres dans le Mondovino anglo-saxon. Par parenthèse, les notes des échantillons de la maison Chapoutier demeurent pour moi un mystère…
Jolie satisfaction enfin en Espagne de voir, sous la plume allègre de Luis Gutíerrez, le Ganko de mon copain Olivier Rivière devenir, avec 94/100, le meilleur rapport plaisir/prix de la Rioja. Déjà qu'on avait du mal à avoir du vin…
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