Les vendanges ? Du vécu, Coco ! Du vécu !
Pour l'œnophile, c'est un privilège que d'avoir vécu des vendanges de l'intérieur. J'ai même un petit peu l'impression qu'on ne comprend pas grand chose au vin tant qu'on n'a pas connu cette ambiance. Que ce soit à la vigne ou au chai (peut-être encore un peu plus au chai), on ressent, on vit le millésime. Et l'on comprend assez vite que faire du vin, c'est à la fois très simple, et un rien compliqué parfois.
Plutôt que de nous vendre, à l'ancienne, du "tout va très bien, madame la marquise", sport au charme suranné mais qui demeure néanmoins très en vogue dans certaines interprofessions viticoles, plusieurs vignerons 2.0 ont décidé de nous faire partager de l'intérieur leurs vendanges 2014. C'est évidemment le Web qui sert de canal à ce striptease automnal. Via les réseaux sociaux, principalement, où, en matière d'iconographie, la mode cette année était justement aux cuisses nues, pour cause de pigeage "à la bourguignonne" (légère perte de vitesse en revanche de l'amphore).
Si vous êtes inscrit sur Facebook, je vous conseille les photos percutantes de Fredi Fresquito Torres de Catalogne en Galice, d'Isabelle Perraud* en Beaujolais, de la diabolique (private joke) Dany Rolland à Bordeaux ou encore, en Bourgogne, de Jean-Pascal Sarnin, Nicolas Rossignol, du Domaine Morey-Coffinet (superbe cliché de Thomas Lambelin ci-dessous). À cela s'ajoutent les images de "visiteurs de la vigne", comme les marchands de vin genevois Jacques et Clio Perrin qui nous entraînent dans les pinots et les humagnes vertigineux. Ou le couteau suisse de la com' liquide & solide, Natacha Billet, qui abandonne les belles tables parisiennes et troque ses escarpins à talon pour des bottes de caoutchouc.
Si vous êtes inscrit sur Facebook, je vous conseille les photos percutantes de Fredi Fresquito Torres de Catalogne en Galice, d'Isabelle Perraud* en Beaujolais, de la diabolique (private joke) Dany Rolland à Bordeaux ou encore, en Bourgogne, de Jean-Pascal Sarnin, Nicolas Rossignol, du Domaine Morey-Coffinet (superbe cliché de Thomas Lambelin ci-dessous). À cela s'ajoutent les images de "visiteurs de la vigne", comme les marchands de vin genevois Jacques et Clio Perrin qui nous entraînent dans les pinots et les humagnes vertigineux. Ou le couteau suisse de la com' liquide & solide, Natacha Billet, qui abandonne les belles tables parisiennes et troque ses escarpins à talon pour des bottes de caoutchouc.
Bref, sur Facebook, les vendanges, on s'y croirait !
Plus détaillé, plus technique, plus intime aussi, le blog demeure bien sûr le média idéal pour ce genre d'exercice, surtout quand on souhaite sortir du folklore, et donner de vraies infos. Des blogueurs-vendangeurs, des "blogueurs de l'intérieur", j'en retiendrai deux qui ont fait cette année un boulot incroyable. Je me demande même comment ils trouvent le temps de dormir, entre travail intellectuel et physique!
Le premier, c'est Nicolas Lesaint, le chef d'orchestre de Château Reignac, à Saint-Loubès dans le Bordelais, auquel on doit notamment la superbe photo ci-dessus, ce chai attendant les beaux raisins de 2014. Je vous ai déjà parlé de son blog, De la vigne au vin, un des plus intéressants Web pinardier français. À l'ambiance des vendanges, aux anecdotes s'ajoute un propos technique, une façon de parler de la viticulture calme et sereine, qui évite soigneusement les discours préfabriqués.
Nicolas Lesaint est un observateur amoureux, un "contemplatif professionnel" de la vigne et de son environnement. Il nous raconte en images les aubes mouillées de la Dordogne mais, vigilant, il fait ainsi partie des premiers à avoir alerté, il y a deux ans, alors que les fonctionnaires dormaient encore, du danger de la mouche Suzukii pour cette culture, vous savez cette espèce de petit diptère à tête rouge qui fait des ravages en perforant les grains de raisins, atteints ensuite par la pourriture acide.
Cette vacherie de Suzukii, un autre blogueur de l'intérieur a fait sa connaissance cette année, c'est Hervé Bizeul. Tenant jour après jour un méticuleux et passionnant carnet de vendanges, l'homme du Clos des Fées a raconté à la première personne du singulier ses espoirs et ses envies, mais aussi ses angoisses, ses doutes et ses nuits blanches devant un millésime pourtant plutôt bien parti.
Car, comme Nicolas Lesaint à des cinq cents kilomètres de Vingrau, Hervé Bizeul s'est penché sur sa vigne, s'est interrogé, essayant de voir les choses derrière les choses. Pendant que certains de ses voisins du sud des Corbières et du nord-Roussillon, coopérateurs surtout, rentraient, sourire aux lèvres, des tombereaux de raisins tantôt verts tantôt aigres, il a fait son métier en tentant de trouver des solutions, faisant des choix, triant, écartant, tranchant dans le vif. Surtout après les trombes d'eau qu'ont reçues les terroirs tardifs de son secteur, mieux valait prendre le taureau par les cornes que de cacher la poussière sous le tapis.
Dans ce carnet de vendanges, il a tout raconté, donc. Ce qui va, et ce qui ne va pas. Il s'est mis à poil, à tel point qu'il m'a fait peur, que je me suis demandé s'il était courageux ou inconscient, tellement à l'opposé des vendeurs de "millésime du siècle" à l'optimisme digne de la Pravda. Il a ainsi raconté les ravages de la mouche Suzukii qui lui a volé quelques tonnes de carignan, la joie de rentrer des cabernet-francs parfaits, le déluge qui détrempe les sols, un blanc qui le ravit, des perdreaux qui tombent à pic, la Tramontane qui ne viendra pas faire le sèche-cheveux, son admiration devant le chasselas de Moissac, les pizzas surgelées et la musique qui fait du bien. Jusqu'à la panne de son tapis de vendange, le dernier jour…
Hervé Bizeul pourra-t-il sortir en 2014 toutes ses grandes cuvées? Peut-être pas. Mais, assurément, pour tous ceux qui l'auront lu, son vin aura un goût humain.
Au delà des joies et des peines, au delà de ce millésime 2014 dont la vendange n'est d'ailleurs pas encore terminée, qui sera formidable pour certains, un peu moins pour d'autres, je me réjouis de voir vivre les vendanges sur la Toile. C'est un signe de bonne santé.
Bravo à tous ceux, vignerons connectés ou amateurs branchés, qui, tant que ce n'est pas interdit en France**, profitent d'Internet pour parler et faire parler du vin, pour montrer, décrire, raconter, célébrer, râler, délirer… La liberté ne s'use que quand on se s'en sert pas.
* Il faut d'ailleurs absolument soutenir Isabelle Perraud et son mari qui à l'occasion du beaujolais-nouveau se sont lancés dans une très jolie et très bonne action, pour aider un petit garçon qui en a grand besoin. Allez-y, c'est ici, soutenez Téo !
** Cf. ma chronique de jeudi. J'espère d'ailleurs pour le bien public que la sainte patronne des prohibitionnistes français, Marisol Touraine, interdira aussi les images de vignerons qui font rire (comme Fredi Fresquito Torres ci-dessous), parce que c'est vraiment intolérable, trop dangereux. Le rire d'ailleurs est dangereux, on peut faire une syncope, etc, etc…
ADDENDA: Je viens de m'apercevoir que j'avais oublié, dans ma galerie de portraits, de citer le chef de file des caviste-vendangeurs, Bruno Besson, des Cépages d'Ermont! Je suis foutu, comme la fée Carabosse, il va me jeter un sort ! Pour me rattraper, le voici en photo (DR): 32 litres tout de même cette année de vin nature de la banlieue nord, sucres et malo finis.
** Cf. ma chronique de jeudi. J'espère d'ailleurs pour le bien public que la sainte patronne des prohibitionnistes français, Marisol Touraine, interdira aussi les images de vignerons qui font rire (comme Fredi Fresquito Torres ci-dessous), parce que c'est vraiment intolérable, trop dangereux. Le rire d'ailleurs est dangereux, on peut faire une syncope, etc, etc…
ADDENDA: Je viens de m'apercevoir que j'avais oublié, dans ma galerie de portraits, de citer le chef de file des caviste-vendangeurs, Bruno Besson, des Cépages d'Ermont! Je suis foutu, comme la fée Carabosse, il va me jeter un sort ! Pour me rattraper, le voici en photo (DR): 32 litres tout de même cette année de vin nature de la banlieue nord, sucres et malo finis.
Commentaires
Enregistrer un commentaire