Le vin, le cul, les poils…
Oui, je sais, les grincheux vont dire que j'ai encore trouvé un truc pour faire monter l'audimat d'idées liquides & solides… Mais le cul fait-il vendre? Ça fait longtemps qu'on se pose cette question dans les agences de pub. Moi, je pense qu'utilisé à bon escient, oui. Y compris dans le domaine du vin, où il faut toutefois marcher sur des œufs, pour des raisons légales. Remarquez, en France, sur l'image ci-dessus, ce n'est pas tant à cause de cette exquise amorce d'aréole que vous risquez de vous faire serrer mais juste parce que la dame est prise en flagrant délit de consommation de pinard. Cachez-moi ce verre que je ne saurais voir! Si l'on s'en tient au texte de la Loi (Évin), l'image suivante est plus réglementaire, car elle ne boit pas, le verre est posé à distance, comme un élément de décor. Sauf que la cigarette…
Grande question, donc : le vin a-t-il le droit de parler de cul? Oui, bien sûr. Est-ce de bon goût? Ça, ça regarde chacun d'entre nous. Moi, j'ai toujours trouvé que Bacchus et Vénus formaient un beau couple. Une bodega des îles Canaries a d'ailleurs décidé de fêter une nouvelle fois leurs épousailles à la fin de ce mois*. Ce thème, j'y avais d'ailleurs consacré un ouvrage**, il y a douze ans, rapidement épuisé; on m'en a fréquemment réclamé une suite.
Ce mariage, de l'amour, du sexe, et du vin, est fréquemment célébré sur les étiquettes. Pour le meilleur et pour le pire. J'avais tenté le coup au début des années 2000, avec un grenache que j'adorais dans une coopérative du Languedoc. Retoqué. Le point G avait choqué le kolkhoze et n'avait obtenu l'imprimatur. Ce qui est amusant, c'est que comme à chaque fois, la censure est contournée puisqu'un voisin des Corbières avait récupéré le nom pour s'en faire une cuvée (qui elle bizarrement contenait aussi de la syrah et du mourvèdre). C'est la vie… Le point G a d'ailleurs depuis fait sa réapparition dans la Loire au Domaine de Montrieux, chez Émile Hérédia dont j'adore le pineau d'Aunis, avec du (G)amay à la place du (G)renache.
Je ne vais pas m'étendre sur le sujet, s'il vous intéresse, vous en aurez un aperçu (naturiste, ça tombe bien…) sur les blogs de Sandrine Goeyvaerts et Antonin Iommi-Amunategui, des seins énigmatiques de Brigitte Lahaie au Grololo paillard de Pithon-Paillé. De toute façon, en France, au rythme où ça va, on ne va plus s'embarrasser longtemps avec le design des étiquettes, le Sinistère de la Santé va sûrement trouver un truc pour éradiquer le Mal, et imposer rapidement des mentions "informatives" sur les bouteilles de ce produit diabolique qu'est le vin.
Ce qui me rassure, en tout cas, c'est de voir que nous sommes nombreux à vouloir perpétuer ce mariage de l'amour et du vin. Jusqu'à nos chers (au sens de coûteux) amis les nouveaux prohibitionnistes. À leur façon, ils nous confirment le bien-fondé de cet accord entre Bacchus et Vénus. Je suis tombé sur une des leurs nombreuses œuvres, car les bougres, gavés à l'argent public, sont prolixes: il s'agit d'un texte publié sur le site Web d'une des officines départementales de l'ANPAA, l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie. Il y apparait clairement qu'après être allés fourrer leurs regards inquisiteurs au fond de nos verres, voilà qu'un rien voyeurs, ils inspectent désormais nos alcôves et nos petites culottes.
Remarquez, finalement, ce soudain coming-out, ce soudain intérêt pour le sexe explique peut-être les propos dérangeants de leur chef
de file, Patrick Élineau, qui il y a quelque temps s'était lancé dans un logorrhée
douteuse, amalgamant vin et pédophilie. Vous ne vous souvenez pas?
C'était ici.
Dans ce texte de l'ANPAA du Var, très inspiré par une certaine pensée psycho-moraliste américaine controversée, il n'est plus du tout question d'alcool ou de drogue, mais de sexualité. On y évoque les "déviances", les sex-toys, la masturbation, l'échangisme, le sado-masochisme, le fétichisme (heureusement que l'homophobie est un délit pénal, sinon à mon avis…), mélangeant allégrement des pratiques sexuelles alternatives mais parfaitement légales dans les pays civilisés à des crimes comme la pédophilie ou le viol. Bref, comme d'habitude chez ces malades (j'assume le terme), on amalgame et on sombre dans un puritanisme morbide qui me semble à la longue consubstantiel de leur démarche.
En un mot comme en cent, de la part d'une association financée par l'État français, tout cela me semble malsain, infiniment plus que le fait de se taper une bonne bouteille ou de s'offrir une partie de jambes en l'air. Alors, avant qu'il ne soit trop tard, avant que vos névroses ne vous dévorent, songez-y, mesdames, messieurs les hygiéno-moralistes, faites-vous du bien. Le vin, le cul, les poils, ça détend. Ça purge le radiateur…
* Ça s'intitule Wine & Sex (site Web ci-dessous)et ça se déroulera le 25 octobre prochain, à Tenerife, aux Bodegas Monge. Une sorte de bacchanale à la sauce espagnole, vous pouvez réserver ici.
.. si désirez estre bons Pantagruélistes -c'est-à-dire vivre en paye, joye, santé, faisans toujours grande chère- ne vous fiez jamais en gens qui regardent par un pertuys (Rabelais, chapitre XXIX)
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