Tuer la bulle aux œufs d'or?


Le recette est simple, ancienne et bien connue, c'est celle du cache-misère. Vous prenez ici et là des jus pas terribles mais dûment enregistrés comme champagnes, vous les assemblez, vous les bidouillez et vous leur balancez soixante grammes de sucre, ou plutôt de mélasse par litre. Il vous est peut-être arrivé de retrouver ce genre de machins, étiquetés demi-secs ou doux, sous une épaisse couche de poussière, dans la cave d'un aïeul ou au milieu de la pagaille d'un vide-grenier. 
On pensait ce cauchemar oublié, malheureusement, Veuve Cliquot vient de le ressusciter. Le produit, présenté comme une grande nouveauté révolutionnaire, a été baptisé Rich. Élégance quand tu nous tient… Il s'agit évidemment d'une trouvaille géniale qui a demandé des années de recherches et de mise au point. Qui va contredire le communiqué de Presse? Sûrement pas ceux dont le métier consiste à le copier/coller et à l'intercaler sous forme de "rédactionnel" destiné à être intercalé entre les pages de publicité sur papier glacé. Rich sera donc un succès, d'autant que suivant la mode du moment, la merveille s'adresse aux amoureux, de préférence noctambules, de la "mixologie". Ce sous-champagne à la traçabilité encore plus incertaine que celle des autres soupes industrielles est destiné, un peu comme le So Terne d'il y a quelques mois, à être coupé avec tout un tas de saloperies, et largement noyé sous la glace. Sur le site dédié, on vous explique comment y balancer du concombre, du poivron, du pamplemousse… Ne manquent plus que la paille et le verre "givré", on est jeune ou pas?


N'est-ce pas cependant un jeu dangereux auquel joue cette grosse usine à bulles? Bien au delà du côté "vin Coca-Cola" de l'affaire (pour reprendre le mot de Michel Rolland), ne risque-t-elle pas, à force, de détricoter le formidable marketing construit pendant des siècles autour de ce nom de champagne. Parce que là, même si la marque, Veuve Cliquot, existe toujours, l'appellation s'efface peu à peu derrière le concept. Et des équivalents du Rich, des Smart, Chic, Night, Bubbles ou ce que vous voulez, on pourra très vite en fabriquer aux quatre coins du vignoble mondial. Les fabricants de mousseux sont réactifs, bien organisés et … riches. 
J'imagine d'ailleurs qu'on va très vite plancher là-dessus, au royaume espagnol du cava, pour sortir un produit homologue, au goût identique, avec un habillage encore plus flashy, et à moitié prix. Ou même à un quart du prix si le marché le réclame. Avec le risque que tout ça se finisse en rosé-pamplemousse, en sangría ou en clara gazéifiés. Alors, face à cette concurrence que les Champenois ne manqueront pas de trouver "déloyale", les enfants de la Veuve se diront qu'il est urgent d'inventer une origine à son produit afin de la protéger…




Commentaires

  1. Ils n'en sont pas a leur premier coup d'essai, moet ice etait lance il y a environ 2 ans...meme concept, meme boutique, meme public, memes ingredients...de la merde bien emballe dans du papier brillant. La franciacorta doit bien se marrer....

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