Les travelos de la gastronomie.


Cet homme, cette femme, comme vous voulez, Bruce ou Caitlyn, à la Une de Vanity Fair, ne ment pas. Il ou elle laisse s'exprimer sa nature, ce qu'il ou elle pense être sa nature. C'est son image qu'il travestit, pas ce qu'il pense être sa réalité.
Cette photo qui interpelle, qui choque l'Amérique, et l'excite en même temps, n'est pas là pour mentir. Elle montre, elle raconte, crument, sans déformer, sans embellir ou enlaidir, quelque chose qui existe. Un cliché signé Annie Leibowitz qui s'est comme souvent refusée à toute retouche. La "vérité" est nue.


Il en va tout autrement de la pantalonnade qui se déroulait à Londres, le World's 50 Best restaurants. je suis stupéfait de voir de quelle façon, sans le moindre esprit critique, cet évènement publicitaire est relaté, pris pour argent comptant par certaines agences de Presse, voir des journaux dits sérieux et devient, par un coup de baguette magique, le "classement des meilleurs restaurants du monde".
Là, on avance masqué, drapé dans l'intérêt supérieur de la gastronomie, qui doit bouger, créer, inventer. Le nez enfariné, on vous raconte que c'est fou, jeune, moderne. Et évidemment, si c'est fou, jeune, moderne, on n'a plus qu'à s'écraser. En plus, c'est cool, on aide l'Afrique, on s'intéresse aux tables des pays du Tiers-Monde et même aux sous-développés de la bouffe, comme les Scandinaves ou les Russes. "Si tu comprends pas ça, vieux, c'est que t'es has-been, un vrai boloss!"


Pourtant, alors qu'un jury hétéroclite où l'attachée de Presse et le VRP surpassent le journaliste* vient de faire monter sur le podium El celler de Can Roca (1er)**, l'Osterria Francescana et le Noma, il est bon de rappeler que tout le cinéma du World's 50 Best n'est là que pour célébrer les noces de la malbouffe avec la gastronomie. De répéter pour la énième fois, face aux applaudissements tarifés, que tout cela n'est que prétexte pour servir la soupe à Nestlé et aux multinationales qui veulent le monopole de ce qui remplira nos assiettes et nos verres. L'enjeu est là, nulle part ailleurs. Et sont récompensés en priorité les bons élèves de ce nouvel Ordre gastronomique mondial***, les plus disciplinés, les plus soumis. Ceux qui auront le mieux travesti la réalité de nos aliments. Les meilleurs menteurs, quoi, ceux qui auront fait du mensonge un "art". Traîtres au patrimoine et à la culture de la cuisine, traîtres à l'agriculture et à l'artisanat. Des petits travelos qui mentent à notre Nature.




* Par parenthèse une tendance lourde du Mondogastro où, pour avoir de "beaux papiers", on a trouvé encore mieux que le journaliste lèche-cul, l'attachée de Presse qui écrit ou blogue. Sujet-verbe-compliment…
** Ce qui confirme la sévère reprise en main du lobbying espagnol. Et couronne une nouvelle fois le talent de Jordi Roca, le plus jeune des frères, pâtissier, et par ailleurs consultant chez Nestlé.
*** Avec en prime une petite pointe de French bashing qui n'est pas pour déplaire aux concepteurs de ce prix, un petit magazine londonien.



Commentaires

  1. Bon. Ben, moi, j'ai déjeuner la semaine dernière avec Pierre et Hervé au Lion d'Or, jadis "chez Barbier", repris par le second de Jean Barbier qui officiait aux fourneaux depuis dix ans. Hé ! Bien, nous nous sommes régalés, toujours avec des plats du terroir. Pour finir, les cannelés maison, imbattables par leur moelleux intérieur et leur croquant extérieur.

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  2. oui donc désolé pour le "déjeuner" qui aurait dû être "déjeuné". Pas vu à la relecture.

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