Voleur, l'air de rien.


C'est juste un coup de gueule, à la volée, sans préméditation. Je tombe là-dessus tout à l'heure*, le nom d'un vin qui sort en Languedoc: L'R de rien. L'R de rien, ça ne vous dit rien? Franchement, si vous vous intéressez au vin et que ça ne vous dise rien, ça signifie que vous n'avez jamais mis les pieds à L'Envers du Décor, la taverne de François des Ligneris, à Saint-et-Millions. François des Ligneris, mon cher François, jongleur d'idées, de vins, de mets et de mots, saltimbanque désormais, car "coupable" d'avoir trop aimé ne pas ressembler aux vilains qui l'entouraient, je ne vais pas vous en parler des heures, d'ailleurs, je l'ai déjà fait ici notamment.


Parmi ses innombrables projets, François des Ligneris a produit ce vin, L'® de rien (ce qui est encore plus joli), marque dument déposée auprès de l'INPI, ce que le premier crétin venu peut vérifier en quelques secondes en se connectant au site Web dudit Institut National de la Propriété Industrielle. Je ne vais pas vous faire tout un couplet sur ce que je pense des voleurs. Et plus encore des voleurs d'idées qui ont l'impression dans leur petite tête matérialiste qu'ils ne volent rien puisqu'ils ne volent que des mots, des idées et que les mots, les idées, c'est de l'air, donc rien. Je vais juste vous resituer le contexte de la naissance de l'authentique ® de rien, du véritable ® de rien, pas de sa contrefaçon, aussi glorieuse qu'une Rolex de Vingtimille. À l'époque (ça ne date pas d'hier), dans tous les "grands" châteaux, c'était à qui allait sortir sa seconde cuvée ou sa cuvée différente, L'Y d'Yquem, le M de Machin et le T de Truc. Donc, comme d'habitude, sans méchanceté, François s'était moqué. Et nous avions bien ri, d'autant qu'en plus que l'étiquette était charmante et qu'elle avait fait des petits.


On me dit que le vigneron qui vient de commettre ce R de rien est un brave type. Je connais certains de ces vins, dont certains étaient dotés de jolis habillages, lui, Yannick Pelletier, je ne crois pas l'avoir rencontré, je ne suis pas sûr. Peu importe. On me dit aussi qu'il a beaucoup d'éthique, que ce n'est pas son genre, qu'il "pense bien", que ce n'est pas un Rapetou, qu'il avait déjà produit un R de Saint-Chinian, qu'il comprendra tout de suite qu'il a fait une bêtise, que peut-être même ce n'est pas intentionnel.


Ce que je lui dis moi, c'est que voler, c'est pas beau, mais que voler quelqu'un comme François des Ligneris, c'est carrément laid. Eh oui, travailler, c'est trop dur, mais voler, c'est pas beau. Même quand on a l'impression de ne voler que des petits riens.



* sur le site Cavus Vinifera où l'on présente par ailleurs d'excellents vins, à l'image des cahors de Fabien Jouves, au Mas del Périé.

Commentaires

  1. Ayant rencontré Yannick Pelletier il y a peu, je pense qu'il s'agit vraiment d'une coincidence... il faudrait voir avec lui mais je serais vraiment très étonné.

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    1. Rejeté, mon cher. Il suffit d'une minute pour consulter le site de l'INPI. Si on ne le fait pas, c'est qu'on ne veut pas. Ou qu'on considère que la propriété intellectuelle est un concept foireux.

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  2. Moi, j'abonde. Ya pas plus coûteux à sortir qu'une idée, qu'une suite de mots qui claquent. Je sais, j'en suis, j'en sue. Ya pas grand chose qui ait plus de force, non plus.

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  3. C est comme si vous vous plaigniez du fait que qqun ait copié le nom d un plat ou une recette de cuisine. L essentiel c est ce qui est dans l assiette (ou dans la bouteille pour le cas qui nous concerne)!! Le vrai combat à mener c est contre la mal bouffe et les mauvais vins ne nous y trompons pas.

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    1. Cher anonyme, soit par mauvaise foi, soit pour d'autres raisons, j'ai peur que ce soit vous qui vous trompiez absolument de débat. Nous parlons là de propriété intellectuelle, à aucun moment je n'évoque ce qu'il y a dans la bouteille, ne noyez pas le poisson et voyez les faits, cliquez sur le lien du site de l'INPI qui montre effectivement le dépôt de ce nom. Après, vous faites peut-être, cher anonyme, partie de cette catégorie que j'évoque dans le texte et qui se fout de voler les idées, les mots, etc, des autres. De cette catégorie pour laquelle le droit d'auteur ne vaut rien.

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    2. http://actu.dalloz-etudiant.fr/fileadmin/actualites/pdfs/D2007-2696.pdf

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  4. L'air du temps ... 70%/vol.sur peau, quand même; pour une boisson alcoolisée, c'est impensable. Mine de rien: Adam avait-il un nombril ?

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  5. En effet, je m assois sur la propriété intellectuelle et lui préfère largement le concept open source... Prochain billet sur les bienfaits des médicaments princeps vs génériques ou logiciel propriétaires vs logiciels libres?

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    1. Vous avez raison, cher anonyme, mélangeons tout, les paquets de chewing-gum et les livres, les bouteilles de Coca-Cola et la musique. Il faut en finir avec cette stupide exception culturelle européenne, et singulièrement française qui protège notamment la propriété intellectuelle! Soyons plus modernes! Vous allez faire fortune en Chine…

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    2. La "propriété intellectuelle" ou industrielle, c'est le sacre des "marques". A cet égard, pas d'exception. Protéger le lien indissociable qui unit une "marque" [fut-elle de fantaisie ?] à une origine géographique, "à ce qu'il y a dans la bouteille", c'est une exception culturelle: ça s'appelle une aoc ... encore faut-il en justifier autrement que pour des raisons de protectionnisme économique ...

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  6. Entre L'® de rien et L'de Rien, il y a quand même une belle différence qui peut difficilement être assimilée à du plagiat, INPI ou pas INPI. Tout au plus une déclinaison ou une variation d'une petite phrase somme toute banale. Je ne vois pas trop où est le mal, à vrai dire. T'en fais pas un peu trop, dans le genre redresseur de torts vini-viticoles, là, Vincent?

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    1. Le dépôt (cf. photo dans le blog ou rapide consultation du site de l'INPI) porte bien sur l'R de rien; le ® était une figure de style. Si c'est banal, il faut choisir autre chose de plus percutant.

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    2. Quand je dis banal, c'est une petite phrase que tout le monde a le droit d'employer dans la conversation, dépôt ou pas à l'INPI. Pas de l'utiliser pour dénommer une cuvée, OK. Mais, je persiste. L'R de rien ou L'de Rien, ce n'est pas la même chose, donc pas une pâle copie ni du plagiat. C'est malin, détourné et pas dit que ce soit volontaire (ou fait sciemment), connaissant (un tout petit peu) Yannick Pelletier et ses vins. Donc, à mon avis, vraiment pas de quoi fouetter un chat...

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    3. Olif, j'ai du mal m'exprimer: l'R de rien ET l'® de rien sont déposés, les deux comme tu peux le vérifier sur le site de l'INPI en lien dans le blog. Donc…
      Et, encore une fois, ce n'est pas de vin dont je parle mais de droit d'auteur, cette notion que l'interlocuteur anonyme du dessus trouve désuète.

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    4. Moi aussi, je me suis mal exprimé, alors. Regarde bien l'étiquette du Saint-Chinian. La position du R n'est pas la même, ce qui ne saurait constituer un plagiat. Même si ça peut se prononcer pareil...
      Sinon, ton billet est un bel hommage à François de Lignéris, quand même...

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    5. C'est ça aussi le truc, Olif, voler c'est pas beau, mais voler un type comme FdL, c'est carrément laid.

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