Sex & Wine & Rock'n Roll (saint Vincent aide nous)
Le vin vaut mieux évidemment que Clayderman et les violons rouillés de baronnes d'origine incontrôlée dont les courts sanglots me font penser à l'hiver. Ce n'est que mon avis et mon avis n'est pas, vous l'avez compris, affaire d'époque ou de mode. Moi qui suis d'extraction complexe (luthérien, jésuite, etc…), pour honorer saint Vincent, je me suis trouvé une chapelle compliquée: un rade improbable, à l'équerre de la plus belle place de Barcelone, cette divine Plaza Real qui, avec un peu de vista et de goût, pourrait devenir une sorte de Place des Vosges d'une ville qui a du mal à se sortir de son esprit fripier, boutiquier.
Rendez-vous, donc, à l'angle nord-ouest de cette place royale, pas loin de ces nombreux bars britanniques dont la bière tiède n'est pas la plus détestable de la ville. Nom de code: Side-Car (prononcez cidé-caré).
Mot de passe: Onne (comme
honey). D'office, on vous tatoue. À l'ancienne. Pas de
passe-droit. Le bon vieux tampon, comme dans les boums d'une
époque que les gamines qu'on vient écouter n'ont pas pu connaître…
Les portes de la chapelle
s'ouvrent. Branchez
la guitare, moi j'accorde la basse. On descend quelques marches,
comme pour se mettre à l'abri des touristes qui n'ont que le
low-cost comme idole. L'odeur de salpêtre nous rajeunit, les
remugles d'égouts nous rappellent que la mer est proche. Damned!
Un diable amer escorté d'une succube asiatique a pris possession du
bar et des catacombes environnants.
Vade retro,
Jägermeister! (malgré tout le respect dans ce monde de bouches
sucrées que j'ai pour ceux qui comprennent les nuances d'amer).
Onne-Honey y las
Furias sont sur scène. Mur de son, façon Ramones
d'aujourd'hui, version féminine.
La sainte Énergie
triomphe. Ne dite pas au père d'Onne-Honey, honnête vigneron
basque, que sa fille joue de la basse sur des rythmes endiablés dans
un sous-sol barcelonais, il la croit RP pour une grande usine de
mousseux. Ne le dites pas non plus à son mari Cristian, il
compose (avec talent) à Genève pendant que Las Furias
dynamitent les fondations de la Plaza Real.
Sur scène, alors que les
bourgeois locaux, en surface, boivent de la bière, ingurgitent du
gin, prennent de la coke (pour éviter les bons conseils du sommelier
catalan binoclard au pas lourd dont je ne dirai jamais le nom mais
que je vais prénommer Manuel, comme son compatriote, le
serveur barcelonais de Fawlty Towers*), on se tape du rouge.
"Ceci est mon sang, etc…"
Que vais-je ajouter à
ça, mécréant, mauvais garçon que je suis? Offrir à Onne-Honey,
comme je lui ai promis backstage, le lien vers cette belle
version du Sex
& drugs & rock n' roll de Ian Dury? Reparler d'Iggy
ou des Clash (spécial
dédicace au basque
bondissant) qui offrent un aimable contrepoint à ma vision
paysanne de la viticulture? Ré-écouter un
vieux Bashung avec Maître Jacques?
Je ne sais pas. Si
peut-être, juste une chose, dire à ces enfants, comme Onne-Honey
et tant d'autres, qu'ils doivent arrêter de croire aux
médailles en chocolat et aux saints de pacotille, que l'énergie qui
les porte est un carburant essentiel et que nous sommes impatients de
les voir mettre un peu plus de rock n' roll dans leurs vins. De chair
aussi.
* j'avais songé un
temps, à cause de son amour des défilés inutiles et du bruit des
bottes, à prénommer mon sommelier fétiche Francisco, mais bon, il est plus benêt, frustré et
maladroit qu'autre chose, ce tampon d'éther. J'avais aussi pensé à
Benito, mais ça fait trop Italien, quant à Adolf, c'est connoté, donc, oui, ce sera Manuel.
Énorme, somptueux.
RépondreSupprimerUn blog avec du punch (pas la boisson :-)
RépondreSupprimerJ'adore !
Bonne fête Vincent !
François