La plus belle plage de Barcelone…
Nous, à Barcelone, notre plage préférée, c'est celle de Biquet. Non, ne cherchez pas sur le plan de la ville, vous ne la trouverez nulle part sur le front de mer, pas plus du côté de la Barceloneta que de la Mar Bella. Cette plage-là se situe deux cent vingt kilomètres plus au nord, sur l'ancienne frontière aragonaise, à l'exacte limite de la Catalogne et de l'Occitanie. Loin de la pollution et de la foule, c'est là, à Leucate, à deux pas des parcs à huîtres, que nous allons goûter à la Méditerranée.
Leucate, pour moi, c'est une vieille histoire, un des rares villages installés sur le rivage audois*, un village où demeurent quelques maigres séquelles d'architecture côtière languedocienne, précieuses traces de cette belle simplicité méditerranéenne miraculeusement épargnées de l'acharnement méthodique de politiciens avides, désintéressés uniquement par la sauvegarde du patrimoine, et de promoteurs idolâtres des esthétiques stalinienne ou mussolinienne.
Oh, Leucate, ce n'est pas non plus Cadaqués, l'esprit pavillonnaire a frappé avec son odieux "mobilier urbain", ses crépis synthétiques beigeasses, ses baies vitrées en plastique, les portails de Bricodépot et sa déco de sitcom… Mais, ici, chaque mois de juin ouvre la paillote de Biquet qui est en soit l'annonce du début d'un bel été.
Oh, Leucate, ce n'est pas non plus Cadaqués, l'esprit pavillonnaire a frappé avec son odieux "mobilier urbain", ses crépis synthétiques beigeasses, ses baies vitrées en plastique, les portails de Bricodépot et sa déco de sitcom… Mais, ici, chaque mois de juin ouvre la paillote de Biquet qui est en soit l'annonce du début d'un bel été.
Biquet, le monsieur sur la photo ci-dessus, c'est un vieux de la vieille. De Narbonne à Carcassonne, il connaît tout le monde. Et tout le monde le connaît. Impossible de dresser une liste exhaustive des métiers qu'a fait cet infatigable chercheur de trésors: partout il chine la beauté, l'inattendu, l'improbable avec la fièvre du brocanteur ou du chiffonnier (qu'il peut être aussi avec talent), il traque ce qui raconte la vie et rendra celle de ses invités plus heureuse. Bref, Biquet est un poète, un sensible qui a tout vu, qui a tout fait et qui pourtant, la nuit, ne ment pas.
La paillote de la plage du Mouret est à la fois un rendez-vous de copains, la tanière des vieilles histoires, une maison de famille, un port attachant, un club de baby-foot et un musée d'art modeste, bref, une sorte d'oasis sur la longue langue de sable de cette côte rongée par une beaufitude savamment organisée. Elle est le prolongement de tous ces lieux en forme d'Ovni créés précédemment par Biquet dans les environs ou à Ibiza. Elle est aussi le prolongement de l'élan suscité il y a dix ans par le petit prince de La Franqui, le regretté Jean-Marc Bébin, retourné récemment à sa mère Méditerranée, lui qui le premier, punk génial, planta des tables et des chaises dans le sable, avec ce qu'il faut de folie, d'amis et de vin pour tenir la marée et faire la nique à la médiocre restauration locale.
Chez Biquet, on vient boire un coup; la plupart des vignerons du coin y ont leur rond de serviette. C'est bien normal, le Cap Leucate n'est rien d'autre que la pointe orientale des Corbières, là où elle viennent mourir en beauté dans la mer. On y boit donc du corbières (Les Clos perdus, Castelmaure, Maxime Magnon, etc…) mais aussi les minervois de Raymond Julien, Jean-Baptiste Sénat ou Borie de Maurel, du cabardès, les grands limoux de Gilles Azam, les vins de la sphère audoise, quoi, et puis des oiseaux de passages comme le Terra Remota de l'Ariégeois catalan Marc Bournazeau… Pas de logique apparente sur la carte, du "nature", du pas "nature", des envies du moments, les vins de la famille…
Ce n'est pas vraiment un lieu débraillé, mais on vit ici les pieds dans le sable. Ça change beaucoup de choses. Les journées ne sont pas formatées, les gamins jouent au ballon, les grands boivent de la Joséphine sur la plage, les couples se font et se défont, les retrouvailles sentent l'iode. Chez Biquet, on est au pays où tout est possible (ce qui fait sûrement enrager les aigris qui doivent rêver d'en finir avec ces espaces de liberté…).
La paillote fait aussi restaurant. Chez les lectrices de Elle Déco, les arbitres des élégances du canton, il est de bon ton de critiquer. Moi, je commande invariablement ce qu'il y a de plus simple** et j'y mange bien: une entrecôte, un aïgo boulido, des calamars a la plantxa, des crustacés… Biquet, ce n'est pas un gastro, encore moins à la sauce audoise, et tant mieux! On y vient avec ce qu'on a, sa bonne (ou sa mauvaise) humeur, c'est à prendre ou à laisser. C'est une paillote, je le répète. C'est surtout un endroit où l'on prend une semaine de vacances en quelques heures. Et ça, ça n'a pas de prix!
*un peu comme Port-La-Nouvelle dont je vous parlais ici.
** mais vous savez que je n'aime pas les "expériences"…
La paillote de la plage du Mouret est à la fois un rendez-vous de copains, la tanière des vieilles histoires, une maison de famille, un port attachant, un club de baby-foot et un musée d'art modeste, bref, une sorte d'oasis sur la longue langue de sable de cette côte rongée par une beaufitude savamment organisée. Elle est le prolongement de tous ces lieux en forme d'Ovni créés précédemment par Biquet dans les environs ou à Ibiza. Elle est aussi le prolongement de l'élan suscité il y a dix ans par le petit prince de La Franqui, le regretté Jean-Marc Bébin, retourné récemment à sa mère Méditerranée, lui qui le premier, punk génial, planta des tables et des chaises dans le sable, avec ce qu'il faut de folie, d'amis et de vin pour tenir la marée et faire la nique à la médiocre restauration locale.
Chez Biquet, on vient boire un coup; la plupart des vignerons du coin y ont leur rond de serviette. C'est bien normal, le Cap Leucate n'est rien d'autre que la pointe orientale des Corbières, là où elle viennent mourir en beauté dans la mer. On y boit donc du corbières (Les Clos perdus, Castelmaure, Maxime Magnon, etc…) mais aussi les minervois de Raymond Julien, Jean-Baptiste Sénat ou Borie de Maurel, du cabardès, les grands limoux de Gilles Azam, les vins de la sphère audoise, quoi, et puis des oiseaux de passages comme le Terra Remota de l'Ariégeois catalan Marc Bournazeau… Pas de logique apparente sur la carte, du "nature", du pas "nature", des envies du moments, les vins de la famille…
Ce n'est pas vraiment un lieu débraillé, mais on vit ici les pieds dans le sable. Ça change beaucoup de choses. Les journées ne sont pas formatées, les gamins jouent au ballon, les grands boivent de la Joséphine sur la plage, les couples se font et se défont, les retrouvailles sentent l'iode. Chez Biquet, on est au pays où tout est possible (ce qui fait sûrement enrager les aigris qui doivent rêver d'en finir avec ces espaces de liberté…).
La paillote fait aussi restaurant. Chez les lectrices de Elle Déco, les arbitres des élégances du canton, il est de bon ton de critiquer. Moi, je commande invariablement ce qu'il y a de plus simple** et j'y mange bien: une entrecôte, un aïgo boulido, des calamars a la plantxa, des crustacés… Biquet, ce n'est pas un gastro, encore moins à la sauce audoise, et tant mieux! On y vient avec ce qu'on a, sa bonne (ou sa mauvaise) humeur, c'est à prendre ou à laisser. C'est une paillote, je le répète. C'est surtout un endroit où l'on prend une semaine de vacances en quelques heures. Et ça, ça n'a pas de prix!
*un peu comme Port-La-Nouvelle dont je vous parlais ici.
** mais vous savez que je n'aime pas les "expériences"…
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