Merci, Víctor, et surtout pas de grand vin!
Ça s'impose malheureusement presque à chaque fois, presque comme une évidence: quand on veut bien manger et bien boire en Espagne, mieux vaut s'éloigner de la côte catalane. À quoi ça tient? D'un productivisme brutal et boutiquier à un manque évident d'ouverture d'esprit, les raisons sont multiples mais ce n'est pas le sujet du jour. Il y a d'ailleurs bien sûr des dizaines d'exceptions à cette règle, exceptions que j'évoque dès que j'en ai la possibilité. Pour autant, samedi dernier la quasi évidence s'est encore imposée.
Là, pour le coup, il s'agissait de boire, pas de manger. Thème du jour, les grenache, les "petits" grenaches. Peut-on trouver, outre-Pyrénées, ces grenache gourmands et déliés qui font la joie des amateurs de vin de la Vallée du Rhône ou du Languedoc-Roussillon? En fait, tout est parti de ce billet que j'avais consacré durant Vinisud à l'Escosses volante, Norrel Robertson, et à son délicieux petit grenache à cinq euros, La Multa. S'ensuivit, comme souvent, un duel courtois sur Twitter avec un des mes contradicteurs préférés, Víctor de La Serna, journaliste émérite*, critique influent et vigneron en Manchuela. Conclusion, j'allais voir ce que j'allais voir et vendredi au courrier arrivait une triplette de grenaches en provenance de Madrid.
Le deal était simple, surtout pas de "grands vins" au sens où on l'entend généralement ici, c'est-à-dire pas de cuvées de concours dont le nez seul incite au refus d'obstacle. Je ne vais pas vous refaire la liste de ces "merveilles" à cinquante ou cent euros (voire plus si ambitions marquées) dont Robert Parker, Jay Miller et Pancho Campo MW ont fait les icônes du mauvais goût américano-ibère; à ce sujet, espérons (vœu pieux?) que Neal Martin, le nouveau Parker boy qui taste aujourd'hui même en Catalogne saura et pourra un peu sortir de ce schéma ringard.
Trois bouteilles donc, à des prix "raisonnables" pour l'Espagne**, c'est-à-dire dans les quinze euros. Nous ouvrons le feu avec le Labros 2010, de la Bodega Marañones en DO Madrid. Nez un peu réduit à l'ouverture (à carafer impérativement), puis superbe, sur le végétal mûr, le foin coupé une heure plus tard. Un vin qui joue davantage sur la fraîcheur que sur l'épaisseur. Pourtant, ça a du fond. Et, évidemment, comme à chaque fois qu'on est en compagnie de vins digestes, ça aime la table. Bravo, Victor! Nous nous sommes compris. on me glisse d'ailleurs à l'oreille que les gens qui font cette jolie bouteille sont des copains d'Olivier Rivière, le Français de Rioja; le monde est petit…
Le deal était simple, surtout pas de "grands vins" au sens où on l'entend généralement ici, c'est-à-dire pas de cuvées de concours dont le nez seul incite au refus d'obstacle. Je ne vais pas vous refaire la liste de ces "merveilles" à cinquante ou cent euros (voire plus si ambitions marquées) dont Robert Parker, Jay Miller et Pancho Campo MW ont fait les icônes du mauvais goût américano-ibère; à ce sujet, espérons (vœu pieux?) que Neal Martin, le nouveau Parker boy qui taste aujourd'hui même en Catalogne saura et pourra un peu sortir de ce schéma ringard.
Trois bouteilles donc, à des prix "raisonnables" pour l'Espagne**, c'est-à-dire dans les quinze euros. Nous ouvrons le feu avec le Labros 2010, de la Bodega Marañones en DO Madrid. Nez un peu réduit à l'ouverture (à carafer impérativement), puis superbe, sur le végétal mûr, le foin coupé une heure plus tard. Un vin qui joue davantage sur la fraîcheur que sur l'épaisseur. Pourtant, ça a du fond. Et, évidemment, comme à chaque fois qu'on est en compagnie de vins digestes, ça aime la table. Bravo, Victor! Nous nous sommes compris. on me glisse d'ailleurs à l'oreille que les gens qui font cette jolie bouteille sont des copains d'Olivier Rivière, le Français de Rioja; le monde est petit…
Deuxième bouteille, attention, c'est la Cuvée du Patron! Plus sérieusement, nous sommes là face à un vin de Víctor de la Serna, Signo, son grenache 2009 de Finca Sandoval. Le nez est un plus marqué par des arômes torréfiés, un poil plus chaud. très jolie bouche en revanche, suave sans excès, les côtelettes d'agneau auxquelles nous le confronterons à table lui donneront même un supplément d'élégance. Joli vin, à nouveau. Jamais deux sans trois?
Et le n°3 s'appelle Pegaso Granito, c'est un 2008, un vin de pays de Castille y León signé Telmo Rodriguez. Incontestablement, le nez est en retrait, moins précis, un peu plus sur l'élevage, avec même un côté "boîte à parfums". La bouche est à l'avenant, à la fois un peu dure et fuyante. En l'état, il n'est pas au niveau des deux autres, on n'a absolument pas cette sensation de "jus" qui les caractérisait, on semble moins franc du collier et on "tire à la ligne". À la fin du repas, ça ne trompe pas, les deux premières bouteilles sont quasiment vides, Pegaso est plein. Par parenthèse, cela fait plusieurs fois en peu de temps que je suis déçu par des bouteilles de Telmo Rodriguez, notamment à cause ce manque de chair. Heureusement que les étiquettes sont toujours aussi belles…
Peu importe, regardons plutôt la bouteille à moitié pleine (aux deux tiers!) que la bouteille à moitié vide. Loin des vins alambiqués, prétentieux, dont l'Espagne s'est fait une spécialité sur les conseils de prescripteurs foireux, critiques, marchands de vins ou sommeliers (ah, ce cher Manuel et son palais tapissé au Coca-cola!), voici deux bouteilles, et notamment le Labros, qui montrent la voie vers des crus plus authentiques, moins "fabriqués", symboles d'une Espagne droite et généreuse, qu'on aime boire et manger, de laquelle nous sommes tous si proches.
Pour ça, merci, Víctor, sincèrement. Je viens, à mon tour (c'est l'autre partie du deal tel que je le conçois) d'emballer trois bouteilles de grenache dans l'étui de polystyrène, un Espagnol et deux Français. Je file à la poste: direction Madrid. Pour les commentaires, on verra dans quelques jours…
* et pas seulement journaliste pinardier, il a eu une vie avant.
** il y a un aspect complètement schizophrène dans cette histoire du tarif démentiel de certains "grands vins" espagnols: d'un côté ce pays triomphe à l'export en vendant de l'ultra bas-de-gamme et ne jure que par des vins hors de prix que personne n'achète.
** il y a un aspect complètement schizophrène dans cette histoire du tarif démentiel de certains "grands vins" espagnols: d'un côté ce pays triomphe à l'export en vendant de l'ultra bas-de-gamme et ne jure que par des vins hors de prix que personne n'achète.
Très convaincant
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