Berlin, avant.


Toujours beaucoup d'émotion en repensant au Berlin de ces années-là. Une pointe de nostalgie que j'ai sans cesse essayé de réprimer car quelque peu obscène quand on sait dans quelle misère vivait une moitié de cette ville. Pas en tout cas la tristesse, la mélancolie du Where are we now? de Bowie.
Plus encore que le légendaire Check Point Charlie des films d'espionnage, je garde gravé en mémoire le 'poste frontière' de Friedrichstraße. Dans un univers bizarre, le métro se faisait machine à remonter le temps. On allait visiter le Communisme comme d'autres un zoo, si loin des singeries et des bonnes blagues de Georges Marchais à la télé française. Sauf que pour nous, coup de bol, notre ticket vers la dictature comportait le voyage retour. À Schöneberg, Kreuzberg, ou même à la UFA-Fabrik de Tempelhof, des nuits de lumière artificielle nous attendaient. On posait devant l'apfelstrudel du Cafe Einstein après l'obligatoire visite aux archives du Bauhaus, on faisait la queue au Dschungel. Parfois même, à midi, au petit déjeuner, on croisait Nina Hagen, planquée derrière les langues de belle-mère de ce café jaune un peu ringard dont j'ai perdu le nom, sur le Ku'Damm.


Drôle d'époque, drôle de ville, drôle de contrastes. Entre un Ouest déjanté, survolté, avec ses recoins glauques, et un Est triste comme la casquette post-nazie des VoPos. Tout se mélangeait, on parlait de musique et de politique, déjà dans les cantines des squats (excellente école de design…), en écoutant Lou Reed, on apprenait à ne pas boire de Caca-Cola et à penser différemment. À Prenzlauer Berg, un magazine occidental valait presque aussi cher qu'une cartouche de blondes ou un jeans Levi's. Les filles étaient compliquées, parfois faciles, la drogue était là, omniprésente. À Tegel, la fanfare militaire accueillait en musique un drôle de train aux stores baissés où il arrivait que le caviar et la vodka animent le voyage.
C'était Berlin, une autre ville. Une autre vie. Heureusement, de ce mur, il ne reste que des reliques. Pour ne pas oublier. Comment oublier?






Commentaires

  1. Tu sais qu'il est question de le détruire, le reste du mur ?
    Pourtant, aller à Berlin et le voir pour se rendre compte me parait incontournable.

    Quelle ville par ailleurs !
    Quel coup de cœur, sans trop savoir pourquoi.
    Au fil des promenades je me disais que cette ville n'a pas de style, et que c'est cela qui fait le sien.

    Grâce à Marie von Ahm, nous y avons découvert de sublimes vins allemands et autrichiens.
    C'était une cerise sur le gâteau.

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  2. 1989. Juillet. Berlin était MON pèlerinage, ma destination. J'ai longé le Mur,
    de tout son long, goûté aux paradoxes de la liberté emmurée, Est communiste soft, Ouest déjanté en survie... Berlinois accueillants pour le petit bourgeois que j'étais. Du haut de mes dix-neuf ans, pendant dix jours, béton, barbelés, herbe du Tiergarten, totale anarchie des squats, alcools et dérives... Merci Berlin, de m'avoir fait jouir... L'allemand, quelle belle langue quand elle vous caresse la vôtre, maîtresse dont je n'ai retenu que le prénom. Merci pour votre attention.

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