Je me drogue, et ça me fait du bien!


Ce qu'il y a de sympa depuis que la première vague d'élections est passée en France, c'est qu'on peut se mettre à relire les quotidiens sans subir les assauts de militants de tous bords, à peu près aussi pénibles que les supporters de football. Pour quelques jours, la Presse devrait se consacrer à son activité normal: le journalisme. À ce propos, pour ceux qui ne l'ont pas encore fait, jetez-vous sur ce papier du Monde signé Raphaëlle Bacqué et Ariane Chemin qui raconte le chemin de François Hollande du désert à l'Élysée.
Mais, c'est de drogue, pas de politique dont je voulais vous entretenir. Et en la matière, c'est dans un entrefilet du Figaro que j'ai pêché cette excellente nouvelle, une de mes drogues préférées est aussi un formidable médicament. Quel plaisir de lire ces quelques lignes, véritable apologie de ce produit, évidente incitation à la consommation de substances stupéfiantes!


Alors non, il ne s'agit pas du vin. Ça, on sait depuis longtemps que le professeur Got, ses chandails tricotés par maman et sa clique de médecins à l'élégance soviétique évitent soigneusement de nous avouer ses bienfaits, bienfaits maintes fois mis en évidence par de grands professionnels de la Santé, tel le professeur Ferrières, au CHU de Toulouse, prouvant il y a quelques mois encore que le vin avait du cœur. Il ne s'agit pas non plus de la Marlboro-qui-rigole, de cette Marie-Jeanne dont j'ai lu par ailleurs que la nouvelle mode en Californie était de la substituer à la ciboulette ou au persil pour agrémenter certains plats. Pas plus que de la cocaïne dont je persiste à penser qu'elle demeure une des explications majeures du développement de la cuisine chimique en Catalogne. De l'héroïne non plus qui n'a jamais produit que des héros morts (même si ce Sister Morphine de Marianne Faithfull puis des Stones est dans toutes les mémoires).  Et absolument pas de ces médicaments addictifs et remboursés qui guérissent de tout sauf de la Dette publique.
Ma drogue, cette drogue dont Le Figaro fait l'apologie, c'est tout bêtement l'ail. Tonique connu depuis l'Antiquité, il était le speed des bâtisseurs de pyramides et le Viagra d'Henri IV. Je ne peux pas vivre sans. C'est un produit de première nécessité. À tel point que dans les Landes par exemple, les gabelous pouvaient tout saisir chez les paysans sauf leur carré d'ail.


Par sentimentalisme (mais pas seulement!), mon chouchou, c'est le rose de Lautrec. Toujours des mêmes fournisseurs des marchés de l'Albigeois, en manouilles de deux kilos, qu'on mange en soupe l'été, qui fait chanter l'aïoli (ma drogue dure), qui dope les gros poulets de ferme et les gigots de broutard. C'est ma truffe du pauvre, l'accent de ma cuisine et, éventuellement, un crash-test pour les vins. Et, en cette saison, je me régale des aillets, en omelette, en garniture, en salade. Que je plains ceux qui ne l'aiment pas!
Les vertus médicales de l'ail, disais-je, sont connues depuis la Nuit des Temps: tonique mais hypotenseur, fongicide, défenseur du système immunitaire, coupe-faim (avec moi, c'est le contraire…), stimulant, aphrodisiaque, vermifuge, digestif… Et voila que des chercheurs de la Washington State University viennent de découvrir qu'un de ses composés, le sulfure d'allyle, serait un puissant tueur de certaines bactéries, plus efficace que les antibiotiques. En cause, des bactéries qu'on trouve dans les aliments insuffisamment cuits et qui provoquent des troubles intestinaux dont je vous épargne l'inventaire.
Laissons les scientifiques américains achever leur étude, je ne suis pas mécontent en revanche de voir qu'on confirme peu à peu que ma drogue, mon aillicament naturel se révèle au moins aussi efficace (je n'en avais jamais douté!) que ces alicaments industriels, Activia & Cie, dont on nous tant bassiné les oreilles.


Commentaires

  1. Oh, Vincent, si tu passes paar chez moi, rappelle-moi de te donner ce vieux livre en anglais entièrement consacré à ta drogue. Dis donc, ne trouves-tu pas que notre ail du Tarn ou d'Argentine a une fâcheuse tendance à être polluée par une sorte de conservateur qui lui donne un horrible goût de pourri, de moisi ?

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    1. Je le connais, Michel, ce bouquin, Francis Loubatières me l'avait fait lire.
      Pour ce qui est de ce goût (que je n'ai pas chez mes fournisseurs attitrés), il s'apparenterait même à une odeur de bouchon, je l'ai remarqué.

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