Les vignes ne guérissent pas du gel avec des gadgets.

Les jours passant, les médias parisiens, et donc les politiciens (qui y puisent l'essentiel de leur inspiration), découvrent l'ampleur des gelées noires qui ont dévasté une partie du vignoble français cette semaine. Ainsi un des épicentres de ce fléau naturel, le vignoble de Bourgueil, visité cet après-midi par le président du Conseil départemental de Touraine* qui devant micros, stylos et caméras a annoncé le déblocage d'un "fonds d'urgence" de deux cent mille euros.

"Coup de com' ", s'exclame ce soir Guillaume Lapaque (ci-dessus), le directeur du syndicat de l'AOP Bourgueil et de la Fédération des Associations Viticoles d'Indre-et-Loire et de la Sarthe, qui poursuit: "nous n'avons pas besoin de "fond d'urgence" puisque les difficultés de trésorerie ne commenceront pas avant le printemps 2017 (on ne comptait pas vendre le vin de la récolte 2016 avant de l'avoir vinifié !!!). Et deux cent mille euros, c'est précisément 1/1000ème de ce que nous avons perdu."
"Ils ne nous donnent rien d'autre que nos propres impôts... Qu'ils nous offrent précisément trois-cent-trente-trois euros par vigneron... Vingt euros par hectare... C'est à dire à peu près huit piquets en châtaignier par hectare... Alors qu'on vient de perdre presque tout. On ne demande pas d'argent. On voudrait seulement qu'ils ouvrent une concertation avec nous (ils ont fait cette annonce sans le moindre début de concertation) pour essayer de trouver des solutions à ce terrible cataclysme. Qu'on puisse réfléchir tous ensemble pour que le peu d'aides disponibles soient utilisées au mieux pour soutenir nos vignerons... qui le méritent bien!"

"Nous avons besoin d'écoute et de travail pour construire des solutions. Merci aux services de l'Etat de nous avoir apporté cette aide.
Peut-être que, lorsque les collectivités locales auront fini leurs "coups de com'", on pourra se parler...
(Débranchez les communicants de vos cabinets et réveillez les spécialistes de vos services techniques, on gagnera du temps...)"
"Je sais que ce coup de gueule me coûtera cher. Je l'ai poussé parce que j'en ai marre que mes vignerons se fassent insulter. Mes vignerons sont des entrepreneurs, des investisseurs, des employeurs... Des gens responsables. Ils sont face à un cataclysme mais ils sont prêts à faire face. Ils doivent être respectés et n'ont rien à faire des communicants à la petite semaine qui préparent la prochaine campagne électorale de leurs obligés.
J'en ai marre qu'on taise ces vérités que nous sommes de plus en plus nombreux à comprendre, à dénoncer et à exécrer."

Coup de gueule documenté et courageux, donc, mais n'est-il pas nécessaire de mettre un peu les pieds dans le plat face à ce nouvel avatar de la politique-gadget, qui n'a jamais réglé aucun problème.  Bravo Guillaume Lapaque! Suerte!

* Dont je ne connais même pas la couleur politique, détail dont je me fous bien plus que de mon premier verre de bourgueil. Je laisse ce genre de contingences aux militants qui de plus en plus polluent le monde du Vin avec leurs slogans et leurs professions de foi.
** Parmi les médias locaux, certains ne sont pas dupes ainsi la télévision locale de Tours, à regarder ici.