Prescrit par la Faculté.


Peut-être êtes-vous déjà tombé sur ce bouquin, au hasard d'une bibliothèque de famille? La Médecine par le vin, ou Soignez-vous par le vin, ça ne vous dit rien? Il y en avait un exemplaire chez mes parents, souvenir des seventies avec sa couverture ornée d'une caisse à pharmacie remplie de bouteilles. On y sentait poindre un zeste de second degré, mais les prescriptions valent leur pesant de cacahuètes, dans le genre:

               Aérophagie: champagne (sec ou brut), deux flûtes par repas.
               Ménopause: bordeaux de la région du Médoc; deux verres (à bordeaux) par repas.
               Urates: gros-plant.
               Diarrhées: beaujolais (jeune).
               Vieillesse: vins de la région d'Aloxe-Corton.

Soignez-vous par le vin, du docteur E. Maury (pseudo?) a d'ailleurs été récemment réédité, par NIL, indispensable pour tous ceux que cette époque qui abuse de modération ennuie.


Impossible de remettre la main sur ce précieux ouvrage médical, mais je ne suis pas à plaindre, j'ai encore mieux: mon docteur m'envoie ses ordonnances par la Poste, les ordonnances, et le médicament qui va avec! Du fronton, du vin de Toulouse*, une pure négrette de Labastide-Saint-Pierre (mon docteur est du Sud-Ouest). Le facteur m'a livré le colis en début d'après-midi.


Je ne sais pas quelles étaient les indications de E. Maury pour la négrette, mais sans attendre, sans même la laisser reposer, j'ai ouvert la bouteille de mon docteur (enfin, de la femme de mon docteur, car c'est elle, la vigneronne). Et je peux vous décrire les premiers effets ressentis après deux verres: une grande sensation de bien-être, je me sens tout guilleret, je vais d'ailleurs vite enfourcher mon vélo pour profiter de cette belle journée de pré-printemps barcelonais.


La négrette, rejeton de cette belle famille des cotoïdes (lire ici), comme l'auxerrois (ou cot ou malbec) et le tannat, doit donc être un tonique, augmenté d'effets euphorisants. Faut-il le classer dans la catégorie des antidépresseurs, je n'en ai pas idée, il faut que je demande au toubib. N'empêche que ça pète de fruit, que c'est suave (vive 2014!) et que ça fait du bien par où ça passe.
Merci en tout cas, docteur, je te dois combien? Doit-on envisager un traitement de fond (auquel cas, joins-moi l'ordonnance que j'en parle à la pharmachienne du quartier). La bise, Doc, embrasse la famille.




* J'en profite pour en remettre une énième couche destinée aux bistrotiers, cavistes, restaurateurs toulousains. Il est aussi inadmissible que ridicule de ne pas trouver les grands vins du sud-Ouest dans la Ville rose. Faire les sucrées, jouer aux petits Parigots en se faisant photographier avec les vins branchouilles de la capitale, c'est bien, mais il faut aussi avoir les rognons de défendre son identité, être fier du maillot, boire du fronton, du gaillac, du cahors…




Commentaires

  1. C'est buvable Arbeau ? J'étais en classe avec un des gamins, à l'époque c'était de la piquette, comme la grosse majorité des Frontons. Fou comme la technique et le blé peuvent transformer des citrouilles en cendrillons d'apparence.

    Et puis ça n'a jamais vraiment été le vin de Toulouse. A la limite celui de Montauban et des villageux du coin mais bon le neo-marketing et la globalisation sont passés par là et puis on sait bien que tout Midi-Pyrénées se défini comme "toulousain" (ce qui pose la région en terme -de manque- d'identité d'ailleurs...).

    Tom B.

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  2. Si c'est buvable? mieux que ça! J'ai du me retenir pour ne pas tomber la bouteille (mais je dois le faire goûter à ma moitié). Après, c'est tout sauf un vin techno ou un vin de fric: pas de bois, pas d'artifices, juste une belle sélection de négrette de Coutinel.
    Quant à dire que le fronton n'est pas le vin de Toulouse, c'est méconnaître l'histoire? Avant que les Toulousains ne se prennent pour des Parisiens, on en trouvait partout. Il serait temps que ça revienne.

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    1. Ah non Vincent, le Fronton n'a jamais eu bonne presse à Toulouse. D'une part je ne pense pas que la ville soit (ait jamais été) une "ville de vin", d'autre part toujours ceux qui ont voulu boire "bon" (ne serait-que "un peu bon") ont bu autre chose que du Fronton.

      Mais tout change. Tout le temps. Et je pense que le Sud-Ouest sera le prochain truc à boire d'ici 15 ans.

      Sûr, je gouterai "...et ici, chez elle, à Toulouse, on l'appelle négrette"... en essayant de ne pas me demander pourquoi dans le Beaujolais par exemple on ne dit pas (encore...) "et ici chez nous à Lyon" :-)

      Tom B.

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    2. Tom, y-a-t-il un endroit où le beaujolais a été moins "pourri" qu'à Lyon? Des procès en témoignent me semble-t-il.

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  3. Et oui mais maintenant, le caviste toulousain il veut épater la galerie avec du Pfifferling, du Métras, du Houillon-Overnoy...
    Pfff... Tout ça alors qu'un bon BIB de Saint-Sardos ferait si largement l'affaire,..

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    1. Entre "un bon BiB de Saint-Sardos" et les merveilles qu'on trouve dans le Sud-Ouest, il y a du chemin, non, Antoine. Et c'est quand même bizarre de réussir à trouver ces merveilles sur les plus chouettes tables de Singapour (là, précisément, je pense à tous les rouges de Plageoles) et en être privé à Toulouse.

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    2. Soyons clairs. A Toulouse, les bistrots à vins, ça n'existe pas vraiment. Sur le papier, il y a "Magnum" (ex-Vinéa 2) et le Zinzolin. Le premier, tu t'y colles en général une douloureuse assez salée; le second, à part l'entrée de gamme du Mas Pignou (par ailleurs pas franchement renversante), il n'y a pas grand-chose.
      Pour le reste des bistrots, tous font 90% de leur CA sur le café, la binouze et le pastaga.
      Donc on est d'accord, les vins proposés dans la plupart des cas sont de la merde.
      Vient ensuite la question du "boire local". Mais trouver systématiquement des bons canons, et du coin qui plus est, à tous les coins de rue, je me demande si cela a jamais existé. D'ailleurs ils auraient l'air fin les Plageoles et consorts si tout d'un coup tous les restaurateurs et bistrotiers toulousains leur commandaient leurs vins.
      Sans compter qu'on boirait la même chose partout.
      La plus belle carte "locale", à mon sens, il faut faire les 66 bornes qui séparent Toulouse de Gaillac, pousser la porte de "Vignes en foule" et demander la carte qui est dans un étui en cuir pour la trouver. Des coteaux d'Irouléguy jusqu'à Marcillac, il y a de quoi y passer une semaine. Sans compter qu'il n'y a pas que cela...

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    3. D'abord, les bistrots à vin, ce n'est pas une fatalité, ça peut exister à Toulouse. L'ancêtre le prouve, le Nabuchodonosor, où l'on buvait "naturel" bien avant qu'on y songe dans les beaux quartiers dont les ressortissants découvrait à cet époque le "charme" du jus de planche parkérisé.Il y a eu aussi le Bistrot des Vins, où l'on trouvait de tout et qui a plutôt bien fonctionné.
      Dans leur style bar-cave (parce que c'est ça le bistrot à vin contemporain), le Tire-Bouchon et le Temps des Vendanges ne baissent pas la garde. Et ne désemplissent pas. Idem avec le J'Go, qu'on le veuille ou non, c'est une des plus grosses réussites de la ville en matière de limonade. Et c'est en même temps l'exception qui confirme la règle, qu'y sert-on? Uniquement des vins du Sud-Ouest, la plupart des grands y sont.
      Pour ce qui est de Vignes en Foule, la carte est sympa, un peu chère et avec des hauts et des bas.

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    4. Le "Nabu" parlons-en! Je ne sais pas quand est-ce tu y es allé la dernière fois mais à mon avis ça doit faire une paye. Ecoute, c'est simple, ce qu'il s'y boit aujourd'hui est épouvantable. Voilà plusieurs mois que je n'y ai pas mis les pieds à cause de ça. Allez, je le dis? Je crois qu'ils servent le vrac d'un épicier du marché des Carmes. Fais-y un tour à l'occase (au "Nabu", pas chez l'épicier) et dis nous ce que tu en penses.
      Quant au Tire-Bouchon et au Temps de Vendanges, ce sont des cavistes et pas des bars à vins. Le pékin lambda qui se pointe à 16 heures avec trois copains ne peut pas y boire le coup.
      Sur le J'Go on est d'accord, à ceci près que la carte est un peu "courte" tout de même.

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    5. Bonjour Vincent
      D'accord avec vous concernant les merveilles du sud ouest et surtout nos merveilleux vignerons.
      Je viens de recevoir a la maison Guillaume Boussens de Dernacueillette le we dernier( mon invitation à vous y amener tiens toujours, je viens de récupérer un agneau de la falaise) . Il est arrivé avec sa camionnette pleine de cartons de vin et est reparti a vide. Son petit Derna 2013 est vraiment excellent à boire ; les 40 personnes présentes ce soir là se sont retrouvées sur le cul tellement c'était bon. Et sa cuvée Chateau est une réussite. Ce type , et il y en a d'autres , sont pour moi des modèles d'humanité à transformer des cailloux en grains de raisins. A boire a 14 ° au Jgo, qui comme vous le dites fait un travail énorme sur le local.
      Benjamin Cartery

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  4. Bien d'accord Vincent, l'accent toulousain penche aujourd'hui plus côté Languedoc que Sud-ouest. Peut être devrions nous rendre celui-ci à la mode à Paris pour en avoir échos ici !

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