Se protéger des alternatives…
Dans le néoMondovino français, pour faire genre, pour faire djeun, rien ne vaut une bonne grosse critique du système français des Appellations d'origines. Et il est vrai que cette institution (dont on s'inspire désormais à travers le Monde) aurait tout à gagner d'un aggiornamento, pour ne pas dire d'un sévère coup de balai. Inutile de rappeler ici les innombrables exemples de décisions débiles, politicardes, dont le seul but était de de brimer, de couper les têtes qui dépassent.
Que voulez-vous, la majorité a toujours raison, quitte à travestir la démocratie en médiocratie, à donner (dans ce cas précis) des pouvoirs exorbitants aux coopératives et aux gros faiseurs. Car la majorité, nourrie à TF1 et au pousse-caddie, se place rarement du côté des esthètes et des artistes*.
Pourtant, née d'une époque qui n'avait que trop connu les trafics en tous genres, l'Appellation d'Origine Contrôlée me semble plus que jamais un concept valide, utile. À condition qu'elle soit d'abord là pour apporter au consommateur de réelles garanties, à commencer tout bêtement par celle de l'origine du produit labellisé.
Deux anecdotes récentes m'ont conforté dans cette idée. La première concerne le vin. Juste une conversation de bistrot au bord du Canal du Midi, un viticulteur du Minervois qui racontait avec fierté combien il avait vendu de bennes de raisins à un théoricien local du vin "propre", défenseur entre autres de ces vins de tables (Vins de France), si jeunes, si purs. Ça m'a fait sourire (enfin pas trop…), car le fournisseur en question est un adepte de l'approvisionnement espagnol** en matière de pesticides, un de ceux qui aiment doubler les doses, "par sécurité".
Rien que pour ça, pour éviter ce genre d'éventualités, rénovons le système des AOC, débarrassons-le de sa ringardise qui pue la gourmette de président de coopé et le pantacourt et rendons-le à sa mission première.
La seconde anecdote m'a sauté aux yeux dans une boutique, alors que je jetais un coup d'œil à un rayon d'huiles d'olive. Le commerçant distribuait notamment les produits réputés de la coopérative de Clermont-l'Hérault, une valeur sûre du Languedoc. Mais, à côté de la gamme normale, j'ai découvert les étiquettes ci-dessus, cette "Cuvée Alternative". Pour le commun des mortels, c'est une belle huile des contreforts du Larzac, mais si l'on y regarde de plus près, il y a cette phrase écrite en petits caractères: "obtenue en France à partir d'olives récoltées en Espagne".
Attention! Je ne dis pas que l'huile d'outre-Pyrénées est mauvaise. J'en connais (et j'en utilise) de l'excellente. On sait par ailleurs le poids de l'Espagne en la matière, et les charges, les réglementations débilitantes qui pèsent sur les récoltants français. Mais je ne peux m'empêcher de penser au consommateur tout content de rapporter chez lui "un bon produit de l'Hérault"***. Et je me dis que ce bon vieux système des Appellations d'Origines, copieusement rafraîchi, ne serait pas si idiot que ça pour le protéger contre ce genre "d'alternatives".
* N'exagérons pas non plus. À côté des exemples idiots, de ces bavures, il existe en France des milliers de vins géniaux produits en AOP/AOP et validés par les instances officielles. Et n'oublions pas non plus que si parfois certains échantillons se font bananer aux dégustations de contrôle, c'est parce qu'ils sont vraiment en dessous de tout, quitte après à jouer l'air de la victimisation.
** La méthode consiste à aller acheter ses produits de l'autre côté de la frontière, à bas prix, et au mépris parfois des réglementations. J'avais évoqué ce problème ici.
*** Ce n'est pas un cas isolé, l'autre grosse coopérative oléicole du Languedoc, L'Oulibo, à Bize, importe elle aussi désormais des olives pour sa "Sélection". Notons d'ailleurs qu'il n'y a pas de fraude puisque ces huiles ne sont protégées par une appellation d'origine. Ce qui est bien dommage…
Le coup de la gourmette...quel œil affûté ! Je n'aurais pas fait mieux.
RépondreSupprimerCher Vincent, pour y avoir été sur place il y a quelques mois (à la coopérative de Clermont-l'Hérault,), et voulant faire quelques achats d'huile d'olives, la responsable m'a bien indiqué la provenance des olives en m'expliquant la grosses pénuries d'olives de la région suite à quelques années de très mauvaises récoltes. Pour avoir quand même quelque chose à vendre, elle a insisté sur l'origine Espagnole des olives mais aussi sur le fait qu'elles étaient de belles qualités et transformées par eux. Avec toutes ces explications claires (et transparentes), j'ai été heureux d'en acheter. A contrario, sans un mot d'explication, j'aurai été très déçus une fois à la maison et remarquant alors l'origine des olives. Merci à cette dame pour m'avoir prévenu 👏👍😃😊
RépondreSupprimerGérard Garroy
Moi, Gérard, c'était dans une boutique languedocienne, et personne ne m'a prévenu, on vendait ça au milieu des produits locaux. Heureusement, je sais lire les étiquettes, même quand c'est écrit en tout petit.
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