La cuisine, la télé, le rugby et les films de cul.
J'apprends en feuilletant la presse télématique (je sais, on dit digitale, mais j'aime le côté suranné de "télématique"), j'apprends, donc, que l'on connaît les jurés d'un de ces concours où des anonymes font à manger dans le poste. Il paraît que ces émissions, TopChefMasterBidule connaissent un franc succès. je veux bien le croire. j'imagine, avec une certaine tendresse, ces familles réunies devant la boîte à cons, généreusement dotées d'un plateau-repas, bio bien sûr (enfin!), jetable (je parle de la bouffe, pas du plateau qui est en PVC réutilisable), démontrant tout l'amour du terroir de leur épicier de quartier, Gérard Carrefour. À moins qu'il ne s'agisse de Jean-Claude Intermarché. Peu importe, c'est pareil.
Et ce grand moment de gastronomie cathodique (je sais, bis…) me rappelle une histoire que j'ai toujours en mémoire et qui date des années quatre-vingt-dix. C'était à l'occasion d'un match de rugby, en France. Franchement, je ne sais plus si c'était la tournée des All-Blacks en 95 avec Jonah Lomu ou le retour à la compétition internationale des Springboks: j'ai un trou. En revanche, je nous revois en tribune de presse. Je suis assis à droite, à ma gauche, à un siège d'intervalle, se trouve Jean Cormier, du Parisien (qui devait déjà ne plus être libéré à l'époque), et, entre nous, une charmante jeune femme, blonde vénitienne, d'une grande fraîcheur. Elle prénomme Isabelle, pour elle, ce jour-là, c'est une grande première, sa première rencontre avec l'Ovalie. Elle ne comprend pas tout, ce qui est logique compte-tenu des règles du rugby, mais s'intéresse, se passionne même pour le combat viril qui se déroule sous nos yeux. Tant et si bien qu'elle s'exclame à un moment:
– le rugby, c'est quand même bien mieux en vrai qu'à la télévision!
– y'a pas que ça qui est mieux en vrai qu'à la télé, grommelle Cormier.
(Je crains le pire, et je ne suis pas déçu)
– Ah bon, quoi? interroge-t-elle, candide.
– Les films de culs…
Eh bien, je ne sais pas pourquoi, mais j'ai immédiatement pensé à cette histoire en lisant cet entrefilet sur TopChefMasterBidule et ses prestigieux jurés, et en m'imaginant les familles réunies devant la boîte à cons avec leurs plateau-repas. Peut-être parce que la cuisine, c'est comme les films de cul et les matches de rugby, c'est mieux en vrai qu'à la télé?
Excellent post Vincent, qui me renvoi aux paroles d'un tout aussi excellent auteur, philosophe, fin observateur de la condition humaine et chanteur de variété (sic!)... j'ai nommé Jean-Jacques Goldman. "Elle vit sa vie par procuration" titrait la chanson (et "devant son poste de télévision" aura résonné dans votre tête j'imagine). C'était il y a 28 ans ! Aujourd'hui rien a changé, c'est pire, manque de curiosité maladif de notre société qui se contente d'observer ce qui l'entoure par l'écran 16/9ème de la lorgnette. Plus d'exigence, plus de recherche de qualité, on avale sans réfléchir, sans se demander. Du coup des cons osent tout (comme faire une compil de reprise des chansons de Goldman par des chanteurs insipides) et vident les choses de leur sens... C'est triste ! Mais ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain et pour en revenir au sujet, certains des petits qui sortent de TopchefMasterbidule valent le coup qu'on les goute en vrai (je pense à Pierre Sang par exemple). Alors en 2013 soyons curieux !
RépondreSupprimerCe qui est amusant c'est d'imaginer les gens qui regardent ces émissions en mangeant une pizza industrielle réchauffée au micro onde et en buvant du coca comme la majorité des soirs de la semaine
RépondreSupprimerC'est amusant d'imaginer ces gens regardant une émission sur la gastronomie en mangeant une pizza industrielle et en buvant du Coca comme très souvent dans la semaine. Ce qui me gène dans ces émissions c'est cette espèce de "prostitution" de certains chefs qui seraient mieux dans leur cuisines ou auprès des clients et ce voyeurisme et ce faux suspense quand il faut éliminer un candidat
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