Ouvrez, ouvrez la cage aux oiseaux!


Qui a dit que, face aux scandales alimentaires révélés chaque jour, le silence de l'Europe était assourdissant? Ça y est, la Communauté se réveille! Devant cette situation intolérable qui perdure maintenant depuis des années, elle a enfin décidé de prendre le taureau par les cornes. Elle va s'attaquer à un des plus grands scandales alimentaires de l'époque. Et là, ça ne rigole pas! Finis les chuchotements embarrassés de la farce des lasagne, oubliés les murmures gênés face à une industrie de la malbouffe qui en donne pour son argent (au prix de la merde, on a de la merde) à une populace faussement étonnée. Bruxelles a fait parvenir une mise en demeure au Gouvernement français, avec à la clef de lourdes sanctions pénales et financières. Tout doit être réglé d'ici le 25 mars.


À cette date fatidique, Paris aura impérativement du répondre sur la terrible, l'angoissante, la gravissime affaire de… l'ortolan. Évidemment, les associations tricotées-main jubilent: "pour nous c'est une grande victoire, chante Pierre Athanaze, président de l'Association pour la protection des animaux sauvages. On a apporté toutes les preuves pour dénoncer un braconnage organisé et attester qu'il n'y a pas de lutte contre ce braconnage." Selon les défenseurs déterminés, brigittebardiens, du délicieux bruant, "à la demande de quelques élus influents*, une tolérance totalement illégale, permet aux braconniers landais de capturer vivant ce migrateur lors de son long voyage, pour la consommation". Pire encore, nous apprennent-ils dans un communiqué dont l'Agence France-Presse se fait l'écho: "avant de finir dans l'assiette, l'oiseau est attrapé, engraissé pendant trois à quatre semaines, dans le noir complet, puis noyé dans un verre d’armagnac avant d'être vendu environ 100 euros pièce à des restaurateurs." Hé bé!…


Face à l'injonction européenne, qu'on expédie à Bruxelles le sieur Montebourg, ce n'est pas vraiment son poste, mais comme il a réponse à tout… Je me permettrais d'ailleurs de suggérer à Monsieur le Ministre d'en profiter pour rendre hommage à la très productive concision du Général français commandant La vieille Garde à Waterloo. 
Parce que vraiment, ils n'ont pas autre chose à faire à Bruxelles? Pas d'autre urgence? Aucune priorité plus prioritaire? Et là, encore, je ne parle que de ce qui se mange, des lasagnes au cheval ou des kebabs au cochon, des peccadilles qui me font me gondoler depuis quelques semaines. Parce ce que s'ils ont du temps à perdre, les technocrates zélés, les fonctionnaires vétilleux, on a annoncé par exemple aujourd'hui que l'Espagne comptait désormais plus de cinq millions de chômeurs, son record historique. Et en France, ce n'est pas mal non plus.
Franchement, en ces temps où le populisme, le nationalisme avancent à la vitesse d'un cheval au galop (pardon…), alors que les Anglais font mine de se faire la malle, est-il besoin de donner des raisons supplémentaires aux peuples de voir l'Europe comme un rouleau compresseur de leurs cultures et de leurs usages ancestraux? Ont-ils tellement envie de se faire détester et, surtout, de faire détester une œuvre commune au sein de laquelle nous vivons en paix depuis soixante-huit ans?


Donc, ni une, ni deux, que l'homme à la marinière saute dans le premier autocar pour la Gare du Midi et s'en aille dire merde aux eurocrates qui veulent nous empêcher de "cueillir" l'ortolan. Au passage, qu'il leur explique, à eux et à ces khmers verts** macrobiotiques (qui bouffent au moins autant de graines que les oiseaux) que les migrateurs, c'est comme le nuage de Tchernobyl, ça ne s'arrête pas aux frontières, donc si on ne les chasse pas nous…
Non, j'ai une meilleure idée, plutôt que de leur rentrer dans le lard comme il le fait souvent en pure perte, qu'il leur enseigne la beauté de cette chasse ancestrale où l'on ne tire pas le moindre coup de fusil, de cette chasse de pauvres gens, de cette chasse de paysans qui furètent dans les haies. Qu'il leur parle des matoles, de ces cages intelligentes qui doivent continuer d'exister ailleurs que dans les écomusées. Qu'il n'oublie pas de rappeler qu'une certaine agriculture que ces messieurs défendent fait au moins autant de dégâts à cette faune que les gourmets. Qu'il leur raconte la sublime sensation de l'oiseau qui explose et fond à la fois dans la bouche, de cette merveille gastronomique, de ce résumé du plaisir, de cet orgasme gustatif, qu'il leur fasse aussi humer les grandes bouteilles qu'on sort pour l'occasion, pour ces repas incroyables, sensuels. Qu'il en profite pour leur dire que faute d'ortolans, pour se faire la main, on engraisse aussi du pinson des bois et du chardonneret (délicieusement poivré), que nous en rêvons comme eux de leurs barquettes de surgelés roumains. Qu'il leur explique que c'est notre culture.



* Peut-on, dans le Sud-Ouest, voter pour un homme politique qui ne se déclare pas comme Emmanuelli (fournisseur d'un ancien Président de la République), Juppé et tant d'autres, amoureux des petits oiseaux?
** Ils nous avaient déjà fait le coup avec le sanglier qu'il fallait protéger à tout prix, le pauvre! Et maintenant, il a tellement proliféré qu'on a le classer nuisible et l'abattre par tous les moyens car dans de nombreuses régions, il saccage tout à commencer par les vignes aux vendanges.

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