Repris de Justesse! (le 1er bistrot à vin de Barcelone)

On était à deux doigts que cela ne devienne l'Arlésienne de Barcelone. Le rumeur courait depuis de nombreux mois: la capitale catalane allait enfin accueillir un "vrai" bistrot à vin*. Les choses se précisaient, on avait les noms, l'adresse même, mais ça traînait. Palabres, paperasses, procédures, Barcelone est une ville de vieux propriétaires, d'héritiers, vétilleux, âpres au grain. Et puis, la semaine dernière, alors que l'histoire avait failli capoter (enfin vous n'y pensez pas, pourquoi monter un bar à vin en Espagne?) la bonne nouvelle est arrivée, portée sans doute par l'esprit de Noël: L'Ànima del Vi, c'est son nom, repris de justesse aux vendeurs de kebabs et de Coca, va bien ouvrir, en février, et devrait être officiellement inauguré le seize du mois.

Le taulier ce bouclard "à la française", vous le connaissez déjà: Benoît Valée, le caviste naturiste de Gràcia. Il est Français, évidemment! Car il ne s'agit pas là d'ouvrir un énième lieu branché pour simulateurs d'orgasme où une clientèle parfumée, pomponnée se regarde dans les miroirs faire semblant de siroter des dés à coudre de Grands Crus Glacés tandis que des sommeliers dépressifs claquent des talons pour se donner une contenance face à la baisse de la consommation locale de vin. Non, le projet de L'Ànima del Vi consiste à ouvrir un vrai bistrot, où l'on parle, où l'on échange, où l'on s'engueule et on chante, un endroit convivial où le but du jeu n'est pas de se montrer mais de boire des canons.

Un bistrot, c'est d'abord un endroit. Un emplacement, aussi. Pas question pour Benoît Valée de rester dans son quartier de Gràcia, charmant certes, mais coupé du Monde et replié sur lui et ses combats politiques d'arrière-garde. Impossible aussi de s'installer dans l'Eixample, triste et infesté par une clientèle aussi grise que les murs, à peu près aussi intéressée par le vin que je le suis par la reproduction des Staphylinidés dans les forêts de l'Alberta. L'idéal, évidemment, était de trouver un bar existant dans le vieux Barcelone, El Born, el Gótico, là où la ville vit, se mélange en n'oubliant pas son histoire de port cosmopolite.

Avec un peu de chance et la mise sur le tapis de toutes ses économies, Benoît Valée a trouvé le lieu. Pas vraiment mis en valeur en l'état, mais avec un bon nettoyage, un coup de peinture et un éclairage correct, le bar qui s'appelait jusqu'à présent L'Arc del Born, devrait largement faire l'affaire, avec sa vieille arche de pierre et son allure de taverne médiévale. La façade, actuellement en fin de rénovation ouvre sur la partie la plus étroite de la rue(lle?) dels Vigatans, dont elle occupe le n°8. Cerise sur le gâteau, La future Ànima del Vi et ses futures bouteilles de Boulard (entre autres) se trouvent à moins d'une minute à pied de la station de métro Jaume I, cinquante-trois secondes exactement, j'ai fait le test cet après-midi.

Reste l'essentiel, ce qu'on va trouver dans ce premier bistrot de Barcelone. Quelques vins espagnols évidemment, histoire de faire couleur locale, mais apparemment les producteurs français devraient tenir le haut du pavé; il bien faut reconnaître qu'on en trouve infiniment plus qui correspondent à la philosophie du taulier. La tendance sera assez naturiste, mais "ouverte". Les bouteilles qu'on pourra aussi emporter seront vendues à prix caviste + une marge de fixe pas encore fixée, entre sept et dix euros. Tout cela sera accompagné de charcuteries et de fromages.
Dans un premier temps, L'Ànima del Vi devrait être ouverte le soir, sauf le samedi, toute la journée. Benoît Valée et sa compagne Núria seront aux manettes.
Pour une bonne nouvelle…

* Il existe bien des lieux où l'on sert du vin à Barcelone, mais (si l'on excepte les récents changement chez Moritz) aucun ne cultive le côté convivial du bistrot "à la française, on y privilégie une vision néo-espagnole du vin, c'est à dire assez ennuyeuse, pour ne pas dire plus.