Synergies démodées ?


Les apôtres de la rationalisation de l'économie (les mêmes qui, par bêtise, intérêt et/ou suivisme, nous expliquent que l'on ne peut pas vivre sans caddies) vont une fois de plus nous rire au nez. Aujourd'hui, il faut voir global, consommer, jeter, gâcher. C'est ça la "modernité", on ne s'emmerde plus avec ce (ceux?) que l'on laisse au bord du chemin.


Si je vous en parle, ce n'est pas en lien avec ma chronique d'hier. Quoique… En rentrant du marché, et de son chai, la femme de mon docteur (qui est aussi vigneronne) nous a rapporté un cadeau. Deux en fait, deux cagettes, l'une de magnifiques tomates, pulpeuses, sucrées, de son cher Frontonnais, l'autre d'une incroyable cargaison, couleur miel, qu'on dirait sauvée in-extremis des ruines d'Alep.


Pourtant, ces savons-là, patinés par le temps, concentrés par les ans, ne proviennent pas de Syrie mais de Marseille, via le Tarn-et-Garonne. Ils sont le fruit d'une économie plus soucieuse de son environnement qui, pour créer ses savons "de tradition" ne faisait pas venir de Chine, en containers, une matière brute d'origine incontrôlable. 


À l'époque, en 1946, Cécile, l'arrière-grand-mère d'Anne Arbeau, la vigneronne femme du docteur récupérait les pépins de raisin issus de la distillerie familiale. Puis, grâce à la gare de son village de Labastide-Saint-Pierre (disparue depuis), les expédiait à plusieurs entreprises des Bouches-du-Rhône, dont la Savonnerie nouvelle. Des pépins bienvenus en cette période d'après-guerre; le savonnier les pressait pour en extraire une huile qui servait de base aux magnifiques savons que vous voyez ici. Cécile Arbeau, ainsi que les vignerons qui avaient distillé recevaient en retour du savon, précieux en période de pénurie.


Comme vous l'avez déjà lu*, je suis fan de savons naturels. J'ai donc essayé ce modèle vintage, vieux de soixante-dix ans. Il mousse, caresse et lave mieux que n'importe gel à la con, avec en prime de délicats arômes tertiaires de laurier, de tabac brun et même de vieux armagnac. Bref, ma peau s'est régalée!


Et tant qu'à faire dans les produits de beauté unisexes, après le savon de son arrière-grand-mère, Anne, spécialiste de la négrette, m'a fait goûter son petit dernier, un gamay de Fronton, un 2015 friand, croquant (qui ne savonne pas), propre à faire le bonheur de tous ces Toulousains trop souvent réfractaires (les snobs en tout cas) aux beaux cépages du Sud-Ouest, terre qui ferait bien de se souvenir de synergies prétendument démodées.




* Souvenez-vous du savon au cochon de Patrick Duler.




Commentaires

  1. gamay de Fronton ou négrette ?

    Il y avait de belles choses à goûter à la fête des vins de Fronton le we dernier : Le Roc, Plaisance, Viguerie de Beulaygues, La Colombière (et ce joli blanc à base de cépage bouysselet)

    On pourra lire ce cr d'une visite au domaine Le Roc :
    http://invinoveritastoulouse.fr/index.php/degustations-thematiques/appellation-region-pays/744-le-roc-a-fronton-repas-et-verticale-au-domaine

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