2012, millésime du siècle à Saint-&-Millions?


Ah, la "sortie des primeurs", à Bordeaux! Chaque année, cette période fabuleuse me fait vibrer. Le temps suspend son vol, le Monde s'arrête. J'y sens cette fièvre, cette ferveur, cette tension, quelque chose qui m'évoque les grands rituels de l'Humanité. Je ne peux m'empêcher de penser que nous touchons là au sacré, un peu comme dans cette danse des sorciers pétomanes du Nord-Cameroun.
Cette année, l'émotion est à son comble, la cérémonie des primeurs prend un tour tout particulier, puisqu'incontestablement, nous sommes là, avec les 2012 dont on annonce les prix ces jours-ci, dans ce qu'il est convenu d'appeler un "millésime du siècle", surtout à Saint-&-Millions.


Évidemment, malgré tout l'amour du vin, malgré ce proverbial culte du partage, malgré cette passion (au sens religieux), cette générosité qui animent certains grands vignerons, ils ne peuvent faire autrement que donner un léger coup de pouce à leurs tarifs. Le pauvre Hubert de Bouard, après avoir connu des tourments qu'on n'ose imaginer, a pris, explique-t-il au magazine Terre de Vins, “sa plus difficile décision sur les prix depuis 25 ans”. Et il a augmenté son Angélus de près de trente pour cent par rapport à l'an dernier: deux cent cinquante-et-un euros la bouteille (hors frais de port), payables d'avance (sauf la TVA). À son corps défendant, saint Gérard Perse, l'ancien propriétaire de supermarchés devenu châtelain à Pavie l'a suivi, fixant son prix de son 2012 à deux cent cinquante-trois euros.


Je suis sincèrement désolé de vous infliger cet étalage de chiffres, mais seuls les chiffres peuvent nous permettre de comprendre la grandeur, l'exceptionnalité du millésime 2012 à Saint-&-Millions. Des chiffres qu'il faut bien évidemment mettre en perspective: prenez par exemple un millésime considéré comme excellent sur la rive droite de la Gironde, exceptionnel affirment même certains professionnels, 1990. Admettons que, même si toutes n'ont pas tenu la distance, nous avons bu de belles bouteilles de cette année-là. Eh bien, au printemps 1991, L'Angélus 1990 était sorti en primeur à dix-neuf euros TTC (vingt-sept euros constants), tout comme Pavie. Contre deux cent cinquante-et-un et deux cent cinquante-trois euros pour ce 2012 qui ne peut qu'être sublime! Neuf cent trente pour cent d'augmentation en euros constants, vous comprenez bien que là, on n'est pas dans l'à peu près. Pour avoir le courage de prendre une telle décision, "difficile", il faut effectivement se trouver face à un millésime plus qu'exceptionnel, suffisamment pour renvoyer 90 au rayon des médiocrités. Je sais que le terme a été galvaudé, mais, je le répète, je ne vois pas d'autre issue que de l'employer: son prix l'indique, 2012 est LE millésime du siècle à Saint-&-Millions!



PS: sinon, parce qu'il y a aussi des gens biens, à Saint-&-Millions, vous pouvez toujours relire ce texte sur l'admirable François des Ligneris.

Commentaires

  1. Bon Vincent, faut dire que l'Angelus a récemment changé de cloches. Ça a dû coûter bonbon et ça a de quoi filer le bourdon...

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  2. Rodolphe garcias29 avril 2013 à 13:04

    J'ai effectivement des Angelus 88 et 89 dans ma cave....que j'avais payés à l'époque autour de 100 francs.....tiens, ça me fait penser qu'il faudrait que je les boive....

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  3. Ou que tu les vendes... Songes à ce que tu peux acheter comme vins de chez nous après avoir vendu quelques flacons d'angelus !

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    1. D'occase, ça vaut moins cher que neuf, Michel…

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    2. Par parenthèse, les diverses discussions sur l'incroyable tarif d'Angelus a suscité une réaction indignée de Nicolas de Rouyn, sur son blog: http://bonvivantetplus.blogspot.fr/2013/04/pendant-que-jy-pense-11.html

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  4. Rodolphe Garcias3 mai 2013 à 23:57

    Trop sentimental pour les vendre.....

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