Le bonheur est dans le près.


Juste une image, ce matin à Toulouse, une photo chipée sur le net grâce à Rodolphe Lafarge, un blogueur local spécialisé dans la restauration branchée. La vitrine d'un caviste de la Ville rose, Lacrima Vini*, place Saint-Georges, un de ces petits commerçants (race en voie de disparition), qui continuent, malgré les taxes, les impôts et tous les emmerdements qu'on leur fait, d'animer les rues des cités françaises. Saluons au passage les tauliers, deux jeunes, Margaux Menet et François-Xavier d'Arras, qui ont monté ce couple de caves, la première place Saint-Georges et la seconde avenue Étiennes-Billières, il y a deux ans. Comme vous pouvez le voir en illustration de ce billet, les "dictons du jour", c'est leur affaire…


Oui, le bonheur est dans le près, dans la proximité. Oui, en ville, il réside dans le fait de ne pas avoir à prendre sa voiture pour courir des banlieues sordides dès qu'on besoin d'une salade, d'un beau poisson ou d'une boîte d'allumettes. Vivant à Barcelone (ville qui compte plus de vingt marchés couverts et où l'on peut grâce à la loi espagnole ouvrir une boutique en moins de vingt-quatre heures*), j'ai la chance de profiter quotidiennement de cette proximité, d'aller faire mes commissions à pied ou à vélo, de vivre le frigo vide. Cette chance, malheureusement, La Pieuvre de la grande distribution (en grande partie française) tente de l'anéantir, et singulièrement dans l'Hexagone, ravagé par le culte mensonger du moins-disant, du "moins cher que moins cher". Amis français, pensez à la devanture de ce caviste si, puisqu'il paraît que c'est de saison, vous songez à aller visiter une de ces fabuleuses "foires aux vins" que vantent les moutons médiatiques***. Dites-vous bien que si vous le faites, vous collaborerez à la grande œuvre de La Pieuvre, à la fin de la proximité urbaine, à la désertification commerciale des villes****.


Le bonheur est dans le près, il est aussi dans le vin. C'est la leçon que nous donnent ces deux jeunes gens qui abordent leur métier de caviste avec entrain et bonne humeur. Un peu comme d'autres jeunes qui désormais, tels des évangélistes, lancent des wine-trucks sur les routes de France, ils ne considèrent pas le client comme un ennemi.
Pourquoi j'écris ça? Parce que j'ai été choqué par la violence de paroles prononcées ces derniers temps par de vieux professionnels de la profession, des cavistes-inquisiteurs qui veulent, "avec des tenailles", extirper le mal de l'esprit du consommateur, coupable de pas boire "ce qu'il faut boire". Mais foutez-lui la paix au client! Laissez le même parfois jouir de son goût de chiottes!
Je ne crois pas que ce soit en se comportant comme les chanteurs de MJC des années 70 pour lesquels le public n'avait rien compris que l'on fasse progresser la cause du vin. Au contraire, je trouve un rien indigeste, méprisant et doctrinaire, ce cocktail de pensée soixante-huitarde et d'oukases fashionistas. Un cocktail moralisto-hygiéniste qui explique en partie pourquoi de nombreux clients "ont peur" de pousser la porte du caviste (ou du libraire, cf. ci-dessous), qui va les juger, les toiser, les moquer au lieu de se mettre à leur portée. Ce que tous (et moi le premier!), nous devrions faire plus souvent.





* Un caviste digne d'intérêt d'ailleurs, au delà de son talent littéraire, puisqu'il vend les bouteilles de grands vignerons comme Cros, Plageoles, Navarre, Trapet. En plus, Margaux Menet et François-Xavier d'Arras ont l'air, comme moi, d'adorer le restaurant qui fait figure pour les amateurs de meilleure table toulousaine du moment: La (nouvelle) Pente douce d'Hamid Miss, une oasis au pays de la cuisine techno-Métro-bobo.
** Rien que dans mon quartier, j'ai par exemple dénombré une dizaine de poissonneries !
*** Faut-il parler de ces foires ovins au risque de leur faire de la pub? Personnellement, j'estime que oui: dans le concert médiatique, nous sommes les rares voix discordantes, les rares à ne pas aller sucer le mammouth, donc, exprimons-nous, existons, même de façon minuscule.
**** La Nature ayant horreur du vide, La Pieuvre, après avoir fait son sale boulot, installe en centre-ville de fausses épiceries, de faux marchés où elle vend, cher évidemment, les mêmes merdes Nestlé-Monsanto & Cie que dans les banlieues. T'as compris la combine?

Commentaires

  1. Après 5 visites cette année, je confirme que la Pente Douce est un restaurant remarquable.

    Je serai chez Solides vendredi soir (nouvelle adresse rue des Polinaires) pour un repas de groupe (25 personnes, 25 magnums) qui s'annonce très bien.

    L'air de famille, place Victor Hugo vaut le détour aussi.

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