Le plat emblématique français.


Il y a des informations qui se passent de commentaires. Celle-ci, par exemple, ce matin, à la Une du Figaro: les ventes de hamburgers ont explosé en France. Désormais, un sandwich sur deux vendu au pays de Tirel, Rabelais, Vatel, Escoffier, Brillat-Savarin, Montagné, Chapel, Bocuse est un hamburger! En 2000, le ratio était de un pour neuf, en 2007, de un pour sept. Un 2013, près d'un milliard de hamburgers ont été commandés en France, 970 millions très précisément affirme l'étude présentée par le cabinet Gira Conseil, le tout pour un chiffre d'affaire de 7,27 milliards d'euros.
En corollaire de ces statistiques affolantes, on apprend que 75% des restaurants français proposent cette spécialité à leur carte. Le quart des ventes (247 millions d'unités) se sont effectuées à table, dans des établissements traditionnels, pas dans des fast-foods.
Car, à mon sens, c'est bien là le problème. Face aux rouleau-compresseurs américains, McDo et Caca-Cola, nous n'opposons aucune résistance. Au contraire, nous tendons le cul pour nous faire mettre. Rien n'est fait pour protéger notre mode d'alimentation, notre art de vivre et notre culture gastronomique. Et ne me parlez pas du hochet de l'Unesco! Hier encore, la bataille pour le Projet de Loi qui devait sacraliser le "fait-maison" au restaurant s'est terminé par une énième reculade, par un énième baissé de culotte devant les multinationales de la malbouffe.


Éternelle histoire de la poule et de l'œuf, on va me rétorquer qu'on n'y peut rien, que ce sont les consommateurs qui décident. Comme pour TF1, comme pour M6, comme pour tout… On va me raconter, éventuellement sur un ton patelin, rigolard, une fois de plus que le progrès de la médiocrité est une fatalité. Et puis, il y a la Crise. Elle a bon dos, la Crise, y compris pour justifier la paresse.
On oubliera au passage de mentionner tous les renoncements, tous les reniements, toutes les complicités qui auront permis que jusque dans nos assiettes, on foule aux pieds notre culture. La pensée molle, l'absence de pensée des politiques, leur courte vue, l'abandon de toute volonté; la façon dont les tenants de la gastronomie, les cuistots se sont vendus à Nestlé, Monsanto et consort, sur les traces des chefs-putains espagnols (regardez le beau hamburger ci-dessus, à Tickets, chez Ferran Adrià); la prépondérance de la grande distribution, le gavage des cerveaux par la télévision (autrement plus préoccupant que celui au maïs des palmipèdes gras); les méthodiques léchages de cul des foodistas à l'univers Nutella-Caca-Cola & Cie; cette école de la République qui ne veut plus instruire mais éduquer…
Alors, les optimistes rêveront d'une réaction citoyenne. "Citoyen", un des mots les plus galvaudés de ces dernières années. Je n'y crois guère. Pour sauver notre mode de vie, nos "acquis sociaux" aussi comme disent les syndicalistes qui agitent des drapeaux rouges et bouffent des hamburgers, cette réaction est aujourd'hui non seulement nécessaire, mais indispensable. Non, ce n'est pas un acte innocent, sans conséquences de commander un McDo. Il est temps d'arrêter de se défausser, de rejeter la faute sur le voisin. Il est temps d'entrer en résistance.






Commentaires

  1. Je crois qu'une des nombreuses causes de cette intrusion de la malbouffe dans ce pays où la chose culinaire joui(ssai)t d'une place de choix dans l'emploi du temps quotidien de chacun réside dans le temps attribué à la pause de midi. Pour faire un vrai repas, même 1 hre et demi, c'est court; je plaide plutôt pour les deux heures d'arrêt. Qui, de la poule ou de l'oeuf, sont-ce les patrons qui ont réduit cette pause ou les jeunes(?) professionnels qui veulent rentrer plus tôt chez eux et qui du même coup oublient de profiter d'un des plaisirs journaliers de la bouche? Tâcher de remédier à toutes les causes de la malbouffe serait un travail de titan, vaut mieux, comme nous sommes déjà plusieurs à le faire (dont une très grande majorité des lecteurs de ce blog, j'ose au moins l'espérer), prendre le problème à rebours, s'asseoir et prendre le temps de manger et de boire un bon verre de vin, même le midi, merdre!
    Antoine C.

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  2. Pas d accord, il y a un temps pour tout. Je ne rechigne pas au déjeuner marathon qui finit le lendemain matin, mais quand on bosse, on bosse, il y a un temps pour tout. Mais ça n empêche pas un Paris-beurre avec un coup de bojo au lieu d un mac double-shit pré-digéré. Il ne faut pas voir la lutte des classes partout. Vincent a raison, fainéantise et perméabilité a toutes les conneries téloche. C est a la maison que le combat se gagne en éduquant ses enfants, pas en réclament une pause déjeuner de 2 plombes. Antoine, 2 heures de déjeuner, ça veut dire trop de vin à midi. Pas bon! :-)

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  3. Qui se souvient de la " Lemons theory" d'Ackerloff aboutissant à la théorie de la sélection adverse (qui lui valut le Nobel d'économie - c'est pas un gros mot- en 70 avec Stiglitz) ? Non pas une élucubration folâtre sur le citron mais bel est bien une possible explication non paresseuse du fait "que ce sont les consommateurs qui décident"...
    Son principe ? Sur tous les marchés - en l'occurrence le marché des voitures d'occase aux USA, "lemons" signifiant épaves en argot US- le déficit d'information du client face au vendeur entraîne soit la disparition du marché où à tout le moins nombre d'effets pervers dont la baisse des prix pour une baisse générale de qualité. En conclusion et pour faire simple : la mauvaise qualité chasse la bonne en situation d'information asymétrique (le vendeur en sait plus que l'acheteur). Génial non ? Appliqué à bon nombre de marchés dont le luxe, l'alimentation, le médicament : l'époque offre un panel divertissant de la merde généralisée. Au point même de contredire ce brave Ackerloff sur la disparition des-dits marchés : les cochons -pourtant informés- en redemandent et à prix d'or. Et là théorie ou pas je n'aurai qu'un mot à dire pour faire bref : Se sauve qui le peut !

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