J'aime boire l'hiver.
Parler du temps, c'est le propre de ceux qui n'ont rien à dire. De ceux dont il est compté aussi parfois. Je vous passe le météorologisme journalistique avec lequel il ne faut pas être cruel. Comme je suis de bonne humeur, j'y vois une forme d'ingénuité, presque d'émerveillement enfantin. Oui, vous savez, la classe de cours préparatoire, ou de cours élémentaire quand elle découvre par la fenêtre que tombent les premiers flocons.
Chaque année, donc, à la même époque (une telle coïncidence, ça ne peut être qu'un complot, éventuellement judéo-maçonnique), il se met brusquement à faire froid. Ou chaud, d'ailleurs (autre coïncidence troublante). Ces temps-ci, c'est plutôt du froid qu'il est question dans les gazettes. Moi qui ai traversé la France hier, je dois admettre que la Presse, contrairement à ce que beaucoup prétendent, ne ment pas. Les esprits cartésiens, totalement dépourvus de l'ingénuité sus-évoquée, me rétorqueront que c'est l'hiver. Après consultation du calendrier des Postes (je suis en France), j'admets que leur raisonnement se tient. Mais l'émerveillement quand même…
En fait, si je vous parle du temps, c'est que j'aime son influence sur ce que je bois. Sur ce que je mange aussi. Il est question de soif et d'appétit, de cette envie hivernale de se resservir, mais pas que. Au dîner, par exemple, j'ai été émerveillé par les quelques bouteilles (cognac compris) qui ont arrosé le chou farci, le pâté, les rillons, l'andouillette et la rouelle de porc du Poitou. Et franchement, j'y vois un lien avec la météo. Un peu comme pour celui qui s'élève dans les cuves, les barriques et les amphores (vous avez vu, je suis branchouille*, hein?), je vois un effet bénéfique de ce bon coup de froid sur les flacons qui vieillissent sagement en cave.
Bon, ne croyez pas pour autant que l'hiver va vous transformer un tocard en cheval de course, ça aussi on l'a constaté au dîner avec un corbières "de bar à vin parisien" dont les mauvais côtés beaujolaisques (carbo, sucraille, tout ça, tout ça) ont fini à l'évier. Mais les beaux vins semblent, notre soif aidant, étinceler encore davantage. Par exemple ce petit châteauneuf-du-pape avec lequel nous nous sommes dégourdis, long et cristallin, d'une époustouflante buvabilité pour un bébé pareil.
Idem pour les rouges, deux profils différents, mais dans les deux, le même allant. Deux jus de fruit du pays de Carmet, encore jeunots, mais qui n'attendaient que le tire-bouchon. La belle longueur du plus que classique Grand Mont 2005 de Pierre-Jean Druet**, le fruit éclatant des Perruches 2009 de Gérald Vallée***. Quand je pense que c'était notre dernière bouteille de cet adorable saint-nicolas-de-bourgueil!
Bon avant de reprendre la route, d'aller tels des fous du volant (regardez ci-dessous mon beau-frère comme il conduit bien!) chercher nos médocs à Pomerol (comprenne qui pourra), je voulais juste vous toucher un mot d'un vin dont je viens de découvrir avec émerveillement qu'il nous en restait en revanche, à défaut d'une caisse, un plein carton. C'est un bourgogne d'avant les hélicoptères****, un 2002 acheté dix euros tout rond en deux mille onze. Étoffé, parfumé, presque murisaltien. Ça nous aidera à attendre la saison suivante, je crois…
* je rigole, mais même si la mode (comme souvent) m'agace un peu, en tout cas dans ses systématismes idiots, et dans ce qu'elle comporte de panurgisme tout aussi crétin, je n'ai pas été le dernier à dire du bien de certains vins d'amphore. Ici, par exemple.
** Quelle tristesse d'apprendre il y a quelques mois que la belle histoire, exemplaire en son temps, de ce vigneron historique de la Loire s'est si mal terminée!
*** J'ai un reportage tout prêt à vous envoyer à l'occasion sur ce beau Domaine de la Cotelleraie, un des fleurons de Saint-Nicolas-de-Bourgueil. De jolies nouveautés en 2015!
**** Je crois que ça restera, Jean-Marc. En revanche, on a aussi bu une merveille de chez toi récemment…
Je connais bien cette bretelle de rocade bordelaise. J'espère que vous avez bien roulé à 70 pour respecter l'environnement soi-disant mis plus à mal que d'habitude en ce moment (qu'est-ce que ça doit être !).
RépondreSupprimerD'après les chateauneuvois, leurs vins se goûtent moins bien entre 5 et 10 ans. Tu peux imaginer ce que cela donnera quand VT11 se goûtera bien. J'adore VT et la Roquette. Et Florence. Et leur maître de chai de Pommard.