Monastrell gagnant.


Casillas, le gardien de but espagnol, à genoux sur la pelouse du stade Octávio Mangabeira de Salvador de Bahia. L'image (signée de mon pote "L'Énarque" pour AP) a fait depuis hier soir le tour du Monde de la Presse populaire. Et sûr qu'au Café du Commerce, ce matin, on doit se délecter autour des premiers blancs limés de l'humiliation subie par le goal et les footballeurs espagnols en Coupe du Monde. En France notamment où l'on aime bien voir les champions battus.
Loin des jeux du cirque et de la misère brésilienne, c'est pourtant de victoire espagnole dont je veux vous parler, mais dans un domaine que je maîtrise un peu mieux que le football, le vin. Pour vous montrer une bouteille qui, à mon sens, symbolise un match que nous risquons de perdre souvent contre l'Espagne.


Le vin en question s'appelle Castaño. Il provient de la bodega éponyme, énorme winery familiale qui possède près de quatre cent cinquante hectares dans la région de Yecla, au sud-est de la péninsule, dans les montagnes argilo-calcaires qui bordent la région de Murcie; voila effectivement un des secrets de ce vin, il s'agit de vignes d'altitude, cultivées sur de hauts plateaux, entre 400 et 800 mètres au dessus du niveau de la mer. L'autre secret, que la législation espagnole autorise à divulguer sur l'étiquette faciale, c'est que ce vin, mono-cépage, est est élaboré à partir de monastrell. Le monastrell, la monastrell en fait en castillan, n'est autre, vous le savez, que la version ibérique de notre très noble mourvèdre.
Noble? Vous allez vous dire qu'une fois de plus, songeant à de coûteux bandols, je vous parle d'un vin de milliardaire, que personne ne peut s'offrir. Que nenni! Chez le caviste du coin, ici, à Barcelone, ce mourvèdre murcien se négocie 5,20€ Iva incl! Mieux, je l'ai trouvé à 8,24€ à Dortmund, en Allemagne, et à $12.99 à Orlando, en Floride!


Moins de 10€ le mourvèdre bio, qui dit mieux*? Car non content d'être fort agréable à boire grâce à la fraîcheur du mourvèdre par la magie duquel ses 14° passent comme une lettre à la Poste, non content d'être distribué worldwide, cette monastrell est écolo, certifiée, avec une étiquette bien verte pour ceux qui ne l'auraient pas compris.
Dans une Espagne où la conscience écologique n'en est, soyons honnêtes, qu'à ses balbutiements, il est intéressant de noter que ces bodegas, très à l'écoute du marché international, n'ont pas tergiversé quant à leur conversion bio. Loin des palabres kolkhoziennes, des conservatismes qui, en France, ont trop souvent eu raison de cette bascule pourtant primordiale, les familles néo-latifundistes qui les possèdent ont rapidement tranché (et pas spécifiquement pour des raisons humanitaires): le Round-Up et les saloperies du genre, ça fait tache, c'est has-been!
Ajoutez à cela un bon packaging, sans dorures et anglaises dictées par le commercial à chaussures pointues du supermarché du coin, un marketing solide, une politique commerciale aussi souriante qu'agressive, la volonté (avec les moyens afférents) de développer un œnotourisme de qualité célébrant la méditerranéité du raisin et de l'olive, et vous avez quelques unes des clés de la réussite de ce Castaño ecologico. Un vin grand public, bon marché, propre, bien torché et bien présenté, agréable à boire (j'aimerais bien le placer dans certaines dégustations à l'aveugle…), symbole, alors que la France, fonctionnarisée, dont la croissance patine est encore bloquée en gare avec des grèves de train d'un autre âge, d'une Espagne qui se bat, avec ses armes, contre la "fatalité".



* Attention, ne nous cachons pas derrière notre petit doigt, dans un pays où le salaire minimum "culmine" à 750€ par mois, cela rend les choses "plus simples"…


Commentaires

  1. Bien, mais que diable es-tu allé foutre à Orlando ??? ;-)

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  2. 450 ha ça rend (aussi) les choses beaucoup plus simples.

    "La France fonctionnarisée". Je vois vraiment pas le rapport.
    Par contre, que le coût du travail soit plus élevé et la réglementation plus exigeante (un peu plus de rigueur pour la faire appliquée, surtout...), peut-être. Mais je crois même pas.

    Mais ce match on ne va pas le perdre car on ne joue (et ne jouera) pas dans la même catégorie.

    Tom B.

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    1. Bien sûr, Tom, que "ça rend les choses plus simples"! Mais, produit-on les "vins grand publics" (c'est le thème affiché de ce billet) sur des micro-parcelles de 9 ares?
      Pour ce qui est de la réglementation du bio, elle est (heureusement!) européenne, pas française, et contrôlée par des organismes indépendants, pas par des fonctionnaires, lesquels, oui, sont souvent considérés comme des boulets par la plupart des entrepreneurs, viticoles ou pas.

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