Payer plus pour qu'ils ne gagnent pas rien.
Au pays du moins cher que cher, par la disgrâce des caddies que l'on pousse, le moins-disant est devenu une divinité égale au Veau d'Or. Le vin, évidemment, n'échappe pas à la malédiction*. De "foires" soi-disant incontournables en "promotions exceptionnelles", on le réduit, telle une petite pute à une question médiocre: "c'est combien?"
Pourtant, si vous aimez vraiment le vin, et ceux qui tentent chaque jour, à la vigne comme au chai, de lui donner ce supplément d'âme que l'on rencontre rarement sous les néons de banlieue, il va vous falloir accepter, contrairement aux poissons morts, de nager à contre-courant. Le vin, ces prochaines années, il va vous falloir, il va nous falloir accepter de le payer plus cher.
Est-il besoin de rappeler la catastrophe climatique qu'a connue la France, mais aussi une bonne partie de l'Europe**? Les terribles gelées de fin avril ont gravement amputé la future vendange 2017. Jour après jours, un peu partout, des estimations plus précises tombent, rien n'incite à l'optimisme. Et encore, comme me disait tout à l'heure un copain qui n'a perdu "que" quatre ou cinq hectares, "la grêle n'est pas encore passée"…
Les vignerons, déjà éprouvés par un début de décennie compliqué, par un millésime 2016 qui, dans une moindre mesure avait gelé, sont pour certains dans une situation financière (et humaine!) dramatique. Je pense notamment à ces jeunes installés depuis peu, mais pas qu'à eux. Il nous faut les aider.
Alors bien sûr, ici et là, de généreuses opérations voient le jour, à l'image, aujourd'hui encore, en Languedoc, Changer l'Aude en DONS***. Si vous en avez les moyens, n'hésitez pas, allez-y de votre obole!
Mais au-delà ces opérations ciblées, je le répète, nous devrons, sur chaque bouteille, accepter l'idée d'une espèce de prélèvement-solidarité, amical. Ne serait-ce que pour pouvoir dans trois ou quatre ans continuer de boire les vins de domaines que nous aimons et qui ont été dangereusement fragilisés. J'écris ça car je pense que les vignerons ne doivent pas avoir honte, dès maintenant, d'annoncer une hausse circonstancielle de leurs tarifs, pour encaisser le choc. Je pense évidemment en priorité à ceux qui vendant le vin à prix humain, au prix d'une boisson et non d'un produit boursier. On ne parle pas ici de changer les pneus de la Ferrari ou les hélices de l'hélicoptère mais d'éviter de mettre la clé sous la porte, ou même d'envisager de funestes extrémités.
Voilà, c'est dit, amis vignerons, un euro ou deux par bouteille, plus, je ne sais pas, nous nous devons de vous les offrir en échange de tout le bonheur que vous nous procurez.
* Qui rappelons-le n'a rien de surnaturel, on a les modes de distribution que l'on choisit, et que l'on mérite. Cela vaut pour les politiciens qui ont laissé faire n'importe quoi, pour les journalistes qui, pour en rester au Mondovino, taillent annuellement une belle pipe à la GD via leurs glorifications des vins foireux, et évidemment au consommateurs qui décident d'aller pousser un caddie au lieu de d'élire par leurs achats des distributeurs moins brutaux avec les grands équilibres de notre monde, économique, social, écologique, culturel, etc.
*** Tout est expliqué ici.
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