Tximitxurri au château.


À l'évocation de cette sauce, les érudits culinaires vont penser à l'Uruguay, à l'Argentine éventuellement où elle s'est propagée ensuite. Et bien sûr en ce début juillet où la Terre semble tourner rond comme un ballon, on se dira qu'ici aussi il va être question de football. 
Pourtant non, quitte à passer pour un mauvais français, c'est de grillade, de partie de campagne, de (belles) vieilles pierres, et justement du bonheur de revenir en France que je veux vous parler. Le tximiturri d'ailleurs, avant d'être un condiment emblématique de l'Amérique latine (et de devenir chimichurri), est né sous nos latitudes, au Pays basque.


Du tximiturri, comme toutes les grandes recettes populaires, il existe des dizaines de versions différentes, chacun étant évidemment persuadé de posséder "la vraie". La mienne (enseignée à la base par mon ami Bado le peintre uruguayen de Barcelone puis modifiée avec le temps) se permet un grand écart transatlantique, ce qui finalement la rend fidèle à son histoire. J'utilise à la base un mélange de piment sudaca*, baptisé ají et d'origan séchés, d'ail (de qualité) et de persil frais. Fidèle à mes cousins à rhésus négatif, j'y ajoute du piment d'Espelette. Et puis du poivre du Kérala (Shagun, please can you bring me some black pepper, organic if possible? Gracias!), du thym sauvage, du sel, du vinaigre de banyuls ou de jerez, de l'huile d'olive andalouse et, touche personnelle, gasconne, un trait d'armagnac (on est Mousquetaire ou pas?).


Normalement, le tximitxurri s'utilise après cuisson (éventuellement, à mi-cuisson, à la tourne), généralement sur du bœuf, de la vache ou du toro. Personnellement, quelques jours avant le jour J (là, ce sera jeudi prochain), j'y mets à mariner les morceaux de viande, en l'occurrence ce beau toro de combat andalou que nous mettons en pièces détachées ces temps-ci chez mes amis de L'Horloge à Auvillar, issu de la ganaderia Fuente Ymbro installée depuis 1996 au pays du palomino, à Chiclana de La Frontera, dans l'émouvante province de Cadix

Si l'envie vous prends de suivre ma recette, attention, hors de question de cuire ça à la poêle (vous obtiendriez un bouilli catastrophique, à l'anglaise), il vous faut de la braise, ardente, presque trop, pour adopter un style de cuisson violent, sauvage, à la sud-américaine. Optez pour du chêne, du charme ou un charbon de bois propre.


Comme un pied-de-nez à la canicule annoncée, nous avons d'ailleurs décidé d'allumer le feu jeudi prochain (avant une dernière et tonitruante soirée toro le 14 juillet). Ce sera au château de Bardigues, tout près d'Auvillar, pour un marché des paysans bio du coin suivi d'un casse-croûte occitan*. Une espèce de grande fête toute simple sur une immense table nappée de blanc et ponctuée de bougies, façon Milou en mai. On évitera les casquettes de supporters, leur préférant les panamas, histoire de célébrer les modes de cuissons préhistoriques** qui restent nos préférés: la daube de toro et le pain cuiront dans des fours à bois du XVIIIe siècle tandis que je fondrais devant le grill du tximiturri, sorte de sauna campagnard mais diablement efficace. 


Du feu, de la beauté, de saines nourritures, du vin gascon, du pain naturel, de l'armagnac et des copains. On parlera même sérieusement de la Nature et des plantes avec George Oxley et Diana Ubarrechena, co-auteurs avec Gérard Ducerf du génial Manifeste gourmand des herbes folles, sorte de manuel du cueilleur moderne. À jeudi ?




* Pour davantage de renseignement, allez ici.
** Rassurez-vous, il y aura quand même un peu de fraîcheur avec un velouté de morue à la chantilly d'ail, un cannelloni d'aubergine à la burrata  et un étonnant cocktail de wakamé / bulots. Sans oublier les magnifiques figues-fleur de Tarn-et-Garonnes rôties au four à bois.



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